THIERRY C.

Biographie

«Acheter des livres serait une bonne chose si l’on pouvait simultanément acheter le temps de les lire.» Schopenhauer
Et à quoi sert la littérature?
Peut-être à essayer de vivre selon les nuances car la littérature est «maîtresse des nuances» disait Barthes.
La littérature «s'embarrasse» de nuances. Ne se sépare de personne.
Elle s’intéresse aux différences, aux subtiles différences, aux sensibles singularités.
Elle veut comprendre. Raconter. Regarder. Éclairer l’existence.
Teinter la vie. Sucrer, saler la vie.
La littérature aide à respirer. Reprendre souffle. A souffler, un peu. Sûrement!

  • Thierry C.

    « Norma, ma femme, s'était fait la malle avec Guy Dupree et je guettais l'arrivée des relevés de cartes de crédit qui me permettraient de savoir où ils étaient allés. »
    Ray Midge, vingt-six ans d'âge, « glandeur » invétéré, son Colt Cobra planqué au fond de la glacière, part récupérer sa Ford Torino (à tout prix) et sa femme (éventuellement).

    « Qu'est-ce que tout le monde cherche ? il a dit. Norma n'a pas hésité : elle a dit que tout le monde cherchait l'amour. »

    Et c'est parti pour un « road-movie » rocambolesque et hilarant.

  • Thierry C.

    Philip Bowman, jeune homme trop pressé, s’est fixé deux objectifs : rencontrer l’amour et Hemingway.

    Il voit l’avenir suivant ses propres rêves. Il rencontre Vivian. Se marie.
    Mais déjà, «le même couple, le même lit, et pourtant ils n’étaient plus les mêmes.»
    L’Amérique des années 50, l’Amérique d’après-guerre.
    Les mêmes américains, le même pays et pourtant une Amérique qui n’était plus la même.
    Un Amérique très (trop) pressée...et c’est magnifique !

    Le livre de James Salter est un succulent cliché de l’Amérique.
    L’auteur manie dialogues avec véracité et dextérité. Très vivant.
    Les descriptions de «l’american way of life» sont un régal. Éloquent.
    Une sorte de far-west : celle d’une génération désenchantée et désabusée. Une génération à l’ouest !
    A la conquête des illusions perdues.
    Décidément l’Histoire de cette jeune Amérique n’en finit pas de s’écrire.

    Je conseille vivement cette lecture...et rien d’autre...
    Une nouvelle découverte de l’Amérique.
    Un livre fort et irrésistible...
    Encore et encore...
    Un 5 étoiles sur la bannière étoilée de la rentrée littéraire.

  • Thierry C.

    «Et, parfois, la scène semble exister davantage que le monde...»

    C’est l’histoire de Buffalo Bill que nous raconte Eric Vuillard.
    Avec talent comme souvent.
    Celle du «Wild West Show» ou l’invention du show-business.
    Avec son héros Buffalo Bill lui-même qui joue son propre rôle (lamentable légende vivante), un impresario plus que louche, de vrais indiens (avec le véritable Sitting Bull), huit cents personnes, cinq cents chevaux, des dizaines de bisons...
    Une version revue et très corrigée de l’Histoire de la conquête de l’Ouest.
    L’Amérique qui change de peau en ce début d’industrialisation en redemande. Elle a soif de son passé et faim d'avenir prometteur.

    «La foule hurle, l’insulte. On crache. La voilà, la chose inouïe, le Peau-Rouge, celui qu’on est venu voir, la bête curieuse qui a rôdé autour de nos fermes...»
    L’Amérique se donne des frissons.

    Le show fera le tour du monde : Rome, Londres, Paris jusqu’à Nancy !
    La grande parade, la comédie humaine jouée et rejouée.
    Little Big Horn et Wounded Knee tournés en ridicule.

    «Quelques Indiens à cheval tournent autour des rangers en criant comme Buffalo Bill leur a appris à le faire.
    Ils font claquer leur paume sur leur bouche, whou! whou! whou! Et cela rend une sorte de cri sauvage, inhumain. Mais ce cri de guerre, ils ne l’ont poussé ni dans les Grandes Plaines ni au Canada, ni nulle part ailleurs, c’est une pure invention de Buffalo Bill.»

    Mais bientôt le public va se lasser du spectacle.
    Déjà pointent les nez illuminés des Luna Park et autres DisneyLand...
    Les fanfaronnades de Bill Cody vont s’éteindre et tomber dans l’oubli.

    Un livre émouvant. Un livre de révolte.

    «La civilisation était devenue cela : un alliage impossible de nouveautés et de regrets.»

  • Thierry C.

    « Même s’il fait référence à des événements historiques, ce roman est une fiction. »

    Gouiran nous plonge dans le scandale des bébés volés du franquisme.

    “Veiller sur toutes les femmes qui ont fait un faux pas et souhaitent retrouver leur dignité”, qu’ils disaient les fachos de Franco avec la complicité de l’Eglise espagnole. Quand le sabre et le goupillon se donne la main.
    Purifier la race, rééduquer la mauvaise graine, le fameux gène « rouge » et confier les bébés volés à des familles proches du régime, à l’aristocratie espagnole.

    « Les relations intimes existant entre le marxisme et l’infériorité mentale sont évidentes et concluent, sur base de ce postulat, que la mise à l’écart des sujets, dès l’enfance, pourrait affranchir la société de cette idéologie… »
    Dr Antonio Vallejo Nágera, médecin psychiatre et franquiste.

    Franco et ses sbires, l’Eglise, ses soeurs et ses curés mains dans la main, copains-copains comme « cochons ».
    Retenez bien ça, cher lecteur, la glaive et la croix complices de crimes contre l’humanité.
    L’Inquisition, Les Croisades, la Guerre d’Espagne, les massacres au Liban, la dictature en Argentine, les tueries du Rwanda, j’en passe et des bien pires…

    Clovis, journaliste sans frontière, coule une retraite paisible.
    Quand Samia frappe à sa porte : son ami François a disparu.

    « Elle avait défait son manteau et pris place sur le canapé de cuir défoncé, là même où j’avais fait l’amour à des filles que je n’avais jamais vraiment aimées. Tandis qu’elle…Elle avait hanté mes nuits et attisé mon désir sans que j’ose effleurer, ne serait-ce qu’une fois, son cou de mes lèvres. »

    Samia et François, lui aussi un ancien journaliste, ami de Clovis. Samia et François, ça dure depuis plus de trente ans. Eux aussi se la coulent douce dans le marais poitevin près de Niort.

    Clovis et François, deux amis rebelles à l’information officielle , à la recherche de la vérité à travers le monde.
    Samia, rescapée des massacres de Sabra et Chatilla, a choisi François.

    François a disparu. Il enquêtait en Espagne sur ces enlèvements. Une horreur où se mêlent, se mouillent gynécologues, avocats, médecins, prêtres et religieuses.

    Carmen a été internée en 1981. Elle n’a pas oublié l’infirmerie où étaient emmenés les bébés malades. “Certains ne redescendaient jamais. Je me souviens qu’on disait aux mères qu’ils étaient morts, mais une rumeur circulait selon laquelle des familles d’adoption les avaient emmenés. Je ne laissais pas ma fille seule une minute, j’étais paniquée à l’idée qu’elle tombe malade et que je la perde.”
    On estime aujourd’hui le nombre d’enfants volés à plus de 300 000.

    Clovis va reprendre du service et partir à Barcelone à la recherche de François.
    Et il va mettre les pieds dans un plat pas très, hum, comment dire, pas très catholique.

    Le trio, Samia, François, Clovis, peint par Gouiran est un régal nourri d’amitié, de blessures et de regrets.
    Le dessin de Barcelone esquissé par Gouiran est un modèle d’amour pour cette ville qui fleure bon l’anarchisme.

    « Y’en a pas un sur cent et pourtant ils existent
    La plupart Espagnols allez savoir pourquoi
    Faut croire qu’en Espagne on ne les comprend pas » chantait Léo Ferré.

    La très recommandable maison d’Edition Jigal nous offre là, encore, un polar frappant fort au cœur et au corps qui sait avec habileté mêler des destins personnels et la Grande Histoire, celle qui tue dans la plus honteuse des légalités, celle que l’on ne devrait jamais oublié, celle qui devrait nous servir de leçon.
    Frère lecteur, n’oublions pas notre sombre passé pour éviter le noir à venir, le terrible avenir.

    « Tu sais, on sera jugé non pas sur ce que nous avons fait, non pas sur ce que nous n’avons pas fait, mais bien sur ce que nous aurions dû faire. »

    Eteignez votre télé, nom de Dieu et lisez ce bon, ce très bon Gouiran !

  • Thierry C.

    Le bonheur est dans le pré.
    Un roman optimiste : une denrée rare.
    Alors faut pas se priver, pas hésiter : servez-vous une tasse de «L’éveil de mademoiselle Prim», vous verrez ça fait du bien.
    A Saint-Irénée d’Arnois (c’est où ça ?) vit une étrange communauté : des hors-la-loi romantiques.