Alex-Mot-à-Mots
liberté

Dans un pays imaginaire (une île ?), un drame survient : la grande citerne est dynamitée, il n’y a plus d’eau. Le despote Ragazzini arrive au pouvoir et fait la chasse aux nez-verts.

L’un d’eux, le narrateur, est emprisonné pour avoir écrit des slogans appelant à la liberté sur les murs de la ville.

En parallèle, nous découvrons l’histoire de Karole, une petite fille nez-vert qui aimait jouer près de la citerne, elle qui venait d’un pays sans eau.

En lisant ce roman, je suis presque morte de soif avec le narrateur emprisonné qui n’a droit qu’à un demi verre d’eau lors des 3 repas quotidiens.

J’ai compté avec lui les briques rouges de sa cellule.

J’ai aimé l’énigmatique Jagu qui prend dans ses bras le corps de Karole.

J’ai aimé que, même en prison, il écrive sur les murs à la craie.

Un roman en huis-clos qui offre heureusement une forme d’espoir avec la multiplication des points d’eau.

Je m’aperçois que j’ai peine à restituer toute l’intensité du roman tant le style et le propos sont riches.

Une lecture forte sur le racisme.

L’image que je retiendrai :

Celle des gencives omniprésentes dans la narration.

Jostein
Percutant, sensible et éclairé

Belle découverte ! J’aime d’emblée cette écriture incantatoire, son sens de la tragédie et son regard lucide sur les problèmes actuels de société.
Rien de tel pour ouvrir les yeux que de s’inscrire dans un roman d’anticipation, de travailler ses personnages au plus près en les icônisant, de fondre ses messages dans une fable bien construite, à la fois concise et profonde.
Tout commence avec le mouvement et le désir. Trois cent « nez-verts » assoiffés arrivent à Cartmandua, avec dans le cœur « Cet espoir immense en la chance d’un autre destin, d’une opportunité, où tout sera aussi facile que le fait de tourner le robinet d’eau froide. Et boire.»
Mais le village tombe sous la dictature de Ragazzini, faisant exploser la citerne qui trônait comme un trophée de nantis. Installés dans leur confort, personne, hormis Pia, la mère de Thiego, n’a rien vu venir.
Le corps noyé de la jeune Karole, qui avait tant chéri la citerne à son arrivée symbolise la perte de tout espoir. Morte par ce qui devait la sauver. Les images sont fortes pour dénoncer l’inhumanité.
En alternance, nous découvrons Thiego dans la prison de Cartmandua. Le jour de l’explosion de la citerne, il avait appris la maladie de sa mère et décidé de combattre l’injustice avec ses armes, les mots. Dans la tête de Thiego passent toutes les difficultés de la vie en prison, le manque, les regrets, les amitiés et les trahisons. Il résiste en pensant aux mots des livres, aux mots qu’il taguait sur les murs. Il survit en pensant à sa femme, en écrivant son nom sur les murs de sa prison.
Avec ce roman d’anticipation, Céline Lapertot traduit remarquablement l’espoir et la peur des migrants, l’égoïsme des nantis. La force des mots évoque des images choc, symboliques. Le regard sur notre société est percutant, intelligemment glissé dans cette fable aux personnages d’une grande sensibilité.

Elizabeth P.

Je suis complètement époustouflée par l’écriture de Céline Lapertot. 31 ans et une telle maturité, une telle maîtrise !
Dans un pays imaginaire, une énorme citerne d’eau attire des habitants de pays voisins en proie à la sécheresse.
Mais voilà, un jour, la citerne explose.
De nombreux morts dont la petite Karole qui vénérait la citerne. Et surtout, la défiance voire la haine des habitants pour tous ces migrants, les « nez-verts », maintenant que l’eau pourrait venir à manquer ici aussi.
D’autant qu’un dictateur a été nommé à la tête du pays.
Plusieurs voix racontent cette histoire, dont celle de T.qui exprime sa révolte contre le pouvoir par des mots et des tags, celle de Karole, morte d’avoir atteint son Eldorado, celle de Jagu……
De nombreux personnages pour comprendre les réactions en temps de crise.
C’est comme une fable, proche, si proche des réalités de notre monde.
L’immigration, la politique, la société, les travers de chacun, les combats de certains…. Tout est dit, tout est écrit.
Comme un cri de colère, de révolte, les mots de l’auteur nous accrochent, nous prennent à partie et nous entraînent.
C’est fort et c’est puissant.