Michael Mention est un jeune auteur français à suivre. A 34 ans, il a déjà attiré l'attention avec " Sale temps pour le pays " (Rivages noir, septembre 2012), premier volet d'une trilogie policière* inspirée par les crimes du tueur du Yorkshire dans les années 1970. Son profil lui a valu d'être retenu pour un nouveau volet de la collection " Murder ballads " que dirige Stéphane Bourgoin – spécialiste des tueurs en série – aux éditions Ring. Mission : relater la dérive sanglante de David Richard Berkowitz, dangereux paumé qui terrorisa New York voici quarante ans, agressant des couples au hasard, la nuit, en pleine rue, et assassinant six personnes en signant ses crimes d'un énigmatique pseudo: " Fils de Sam ".
S'agissant d'une compilation de documents, d'extraits de presse ou d'enquêtes antérieures, l'auteur s'acquitte de son immersion en confirmant ses qualités de plume. Il fait monter la tension en insérant entre les séquences factuelles d'autres, subjectives, où s'exprime le délire intérieur du tueur. Quant à expliquer les gestes du " Fils de Sam ", sociopathe mais pas fou, ce ne sont pas les hypothèses qui manquent. Depuis les traumatismes de l'enfance jusqu'à une manipulation barbouzarde, en passant par l'influence de drames extérieurs comme l'assassinat de Sharon Tate par Charles Manson, aucune n'est négligée.
Sans prêter à polémique comme d'autres titres du même éditeur (" La France orange mécanique " ou " Utoya ", sur le tueur norvégien Anders Breivik), ce livre laisse cependant un goût d'inachevé. Sans doute un tel sujet aurait-il mérité une enquête de terrain approfondie, qui reprenne le fil des témoignages jusqu'à la surprenante rédemption du tueur, toujours en vie. Ce n'était pas ici le contrat. Faute de quoi certains éléments peu étayés – la secte sataniste comme piste possible – voire purement gratuits - le procès pour viol de Roman Polanski comme élément de contexte – dénaturent l'ensemble. Comme un plat où, faute de tous les ingrédients, on aurait trop forcé sur les piments.