Alex-Mot-à-Mots
policier, Athènes

Comment résister au soleil d’Athènes, sa chaleur étouffante, ses embouteillages impossibles, sa dette insolvable ?

J’ouvre donc le second volet de la Trilogie de la Crise de Markaris.

Si dans le roman précédent, le coupable décapitait ses victimes, dans ce second opus, il préfère la ciguë. Sans oublier de déplacer ses victimes dans des lieux antiques de la capitale.

J’ai aimé le supérieur de Charitos, Guikas, qui se voit doter d’un poste informatique et qui ne quitte plus son fond d’écran végétal des yeux.

L’auteur nous parle des Gastarbeiter qui, dans les années 60-70 sont partis travailler à l’étranger (en Allemagne, surtout) pour gagner de l’argent, puis sont revenus au pays ouvrir leur commerce. La fille de Charitos, âgée de 30 ans, devra à son tour devenir une Gastarbeiter si elle veut pouvoir vivre de son travail.

Un roman sur fond de suicides dus à la crise : quatre vieilles femmes, deux amoureux, un commerçant.

Quelques citations :

En Grèce, dans la fonction publique, la seule façon de monter en grade, c’est de ne rien faire. Ce que le ministre m’offre sur un plateau.

Que disait-il déjà, ce slogan ? Pour des jours encore meilleurs.

L’image que je retiendrai :

Celle de l’amitié entre Charitos le policier, et Zissis, le communiste, anciennement détenu dans les geôles de la dictature.

https://alexmotamots.fr/le-justicier-dathenes-petros-markaris/

sandrine57

Athènes, 2011. La Grèce n'en a pas fini avec la crise qui l'a touchée de plein fouet en 2008. Salaires réduits, retraites rognées, primes supprimées, les grecs manifestent chaque jour dans les rues de la capitale pour crier leur indignation et leur désespoir. D'autres baissent les bras et le suicide devient leur dernier acte de rébellion. Pour le commissaire Charitos, la source d'inquiétude est sa fille Katérina. Il s'est saigné aux quatre veines pour payer ses études de droit et là voilà travaillant presque à titre gratuit à la défense des migrants. Entretenue par son mari, soutenue financièrement par ses parents, la jeune fille envisage l'exil pour enfin pouvoir subvenir à ses besoin par elle-même. Une décision difficile qui met en émoi son mari, ses parents et ses beaux-parents. Miné par l'éventuel départ de sa fille, le commissaire doit aussi retrouver le Percepteur National. Un homme insaisissable qui menace les fraudeurs fiscaux par mail, leur ordonne de payer leurs impôts et les empoisonne à la ciguë s'ils désobéissent. Grâce à lui, ce sont presque 2 millions d'euros qui sont déjà venus renflouer les caisses de l'Etat. Les athéniens en ont fait leur héros, les ministres s'énervent et Charitos marche sur des œufs. Au moindre faux pas, son avancement lui passera sous le nez.

Après le ''Robin des banques'' qui, dans Liquidations à la grecque, semait la mort à Athènes tout en incitant la population à ne plus rembourser ses prêts, voici le ''Percepteur national'' qui s'attaque aux fraudeurs fiscaux qui magouillent en toute légalité pour prospérer sans payer les impôts dus à un Etat complice des plus riches. Encore une fois, Petros Markaris sonde l'étendue de la crise qui touche son pays. Les retraités se suicident, suivis par les jeunes diplômés sans emplois et les petits commerçants ruinés. Les manifestants n'en finissent pas de bloquer les rues d'une capitale dirigée par des politiciens sommés par l'Europe d'améliorer la gestion économique du pays mais peu enclins au changement. Dans ce contexte où la fracture sociale devient un gouffre, les classes moyennes tentent de survivre, inquiètes de voir leur situation se détériorer à tout moment. Le ''Percepteur national'' dont le mobile n'est certainement pas d'aider l'Etat à collecter l'impôt fait office de héros tout droit sorti de l'Antiquité pour rappeler aux grecs qu'une mauvaise action doit être immédiatement punie sans état d'âme. Charitos, quant à lui, cherche avant tout un meurtrier, ce qui n'est jamais chose aisée quand on s'attaque au pouvoir en place. Ménager les susceptibilités, être diplomate, obtenir des résultats rapides, préserver ses chances de promotion...un véritable casse-tête pour le policier qui voit sa fille, avocate, contrainte à l'exil comme les ouvriers des années 70 qui partait en Allemagne pour nourrir leurs enfants.
Enquête policière et étude sociologique se mêlent dans cet opus qui nous mène au cœur des mécanismes d'une fraude fiscale généralisée, lourde en conséquences sur la société. Passionnant et instructif.