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L'Embaumeur est un personnage de roman dont un auteur peut s'approprier les codes et les inclure dans son histoire. Il suffit de respecter les consignes biographiques de Luc Mandoline édictées par Sébastien Mousse. Je l'ai déjà rencontré sous la plume de Stéphane Pajot, Deadline à Ouessant et il existe au moins neuf autres tomes de ses aventures. Aventure inédite que celle-ci puisque cadavre à explorer il n'y a pas et que Luc habitué à voyager reste dans Paris. Samuel Sutra détourne donc les codes de l'Embaumeur pour lui écrire cette histoire oscillant entre polar et espionnage. Rythmée aux sons d'Alain Bashung et aux mots de Gérard Manset qui a écrit Visage d'un dieu Inca - que je n'ai pas encore lu, mais je sens une forte envie de le faire maintenant -, un portrait de Bashung à la mode Manset, ce roman est donc forcément excellent.

Luc n'est pas un enquêteur officiel ni même formé aux méthodes traditionnelles, sa technique est souvent directe, foncer droit devant, dans la gueule du loup quitte à recevoir des coups, ce qui ne manque pas d'arriver. Néanmoins, il peut faire preuve de réflexion et monter des plans plus élaborés qui ne récolteront pas toujours un plus franc succès que la méthode auparavant décrite.

Samuel Sutra dont je commence à bien connaître la bibliographie, est un écrivain qui sait jouer avec différents styles d'écriture : argotique, audiardienne dans sa série des Tonton ou ambiance boite de jazz-détective étasunien dans Kind of black. Là, c'est encore différent, très contemporain, n'hésitant pas à faire un bon mot, à user d'images plus ou moins évocatrices : "Non, décidément, si un jour il devait arrêter volontairement son tour de manège, il opterait pour quelque chose d'autre. Pas les médocs. Non, ça, on n'était pas sûr de ce qui se passait non plus. Peut-être la tour Saint-Jacques. Refaire les expériences de Pascal. Confirmer ses travaux sur la pesanteur et, au passage, ceux de Mike Brant sur l'absence de rebond à l'arrivée. Voilà, concilier confort et apport scientifique. Ce serait une belle fin." (p.39/40)

Marie Vindy, dans la préface parle d'un style "du bon style, qui se la raconte si bien que nous voilà partis à tourner les pages avec délice, avec gourmandise même." (p.8) Et de parler de Léo Malet et de Tardi. Parfait. Que puis-je dire après cela ? Rien, ou si, juste vous conseiller très fort cette nouvelle aventure de Luc Mandoline, un héros à découvrir.