L’Urbex, abréviation de Urban Exploration est une discipline qui consiste à visiter, explorer des sites en ruines et à immortaliser en photos, en mots ou en musique ce patrimoine abandonné. C’est à cet exercice et de façon éminemment littéraire que se livre Sara Stridsberg dans son dernier roman entre pénombre et lumière. Sa mélancolie des ruines se déploie sur celles de Beckomberga, l’un des plus grands hôpitaux psychiatriques d’Europe situé près de Stockholm. Il a ouvert ses portes en 1931 pour les refermer en 1995. Dans cet édifice magnifique et imposant dénommé le « Château des toqués » avait été imaginée une utopie de la psychiatrie visant à libérer les fous de leur statut de laissés-pour-compte et les « sortir dans la lumière ».

**Se tenir à distance de la mort**

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Beckomberga, grand hôpital psychiatrique ouvert dans les années 30 à Stockholm ferme ses portes en 1995. C'est devant ce bâtiment, proche de la reconversion que les pas de Jackie, la narratrice, la mènent. Elle repense alors à tous les occupants de l'asile qu'elle aimait venir voir enfant et au milieu desquels elle a grandi. Jackie retrace pour son fils Marion, le portrait des habitants du "Château des toqués" dont le propre père de Jackie, Jim, a longtemps fait parti.

Dans un mélange doux amer où les fils du passé et du présent s'entre-croisent, c'est une véritable ode à la famille que l'auteure nous propose. Débordant d'amour pour tous ces gens, un peu fous sinon très malheureux, l'histoire de Jackie nous touche par ce qui semble être un refus du monde normal mais qui se révèle être ni plus ni moins que sa propre construction d'une famille, certes bancales mais au moins aimante. Sara Stridsberg tisse avec beaucoup de pudeur, dans une langue épurée et délicate, les portraits de ces gens et des liens indéfectibles qui les unissent. Un très joli roman.