Et si c'était Lui ?
roman
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ISBN 9782809814170
Copyright © L'Archipel, 2004.
DU MÊME AUTEUR
CHEZ LE MÊME ÉDITEUR
Jeanne de l'Estoille :
1. La Rose et le Lys.
2. Le Jugement des loups.
3. La Fleur d'Amérique.
Orages sur le Nil :
1. L'Œil de Néfertiti.
2. Les Masques de Toutankhamon.
3. Le Triomphe de Seth.
Saint-Germain, l'homme qui ne voulait pas mourir :
1. Le Masque venu de nulle part.
2. Les Puissances de l'invisible.
Marie-Antoinette, la rose écrasée
Jacob, l'homme qui se battit avec Dieu :
1. Le Gué du Yabboq.
2. Le Roi sans couronne.
Ramsès II, l'immortel :
1. Le Diable flamboyant.
2. Le Roi des millions d'années.
3. Taousert, celle qui s'empara du ciel.
4000 ans de mystifications historiques
LeXXIe siècle sera religieux ou ne sera pas.
(Prophétie attribuée à André Malraux, qui ne l'aurait jamais proférée, mais qui, de son vivant, ne la démentit cependant pas.)
Seul un Dieu peut nous sortir de là.
(Martin Heidegger, à la fin d'une vie consacrée, entre autres tâches, à définir la différence entre l'être et l'existence.)
PREMIÈRE PARTIE
L'INCONNU DE KARACHI
1
— Vous aviez promis de nous en livrer dix à 5 000 dollars pièce. Et maintenant vous ne nous en offrez que huit à 6 000 dollars. Nous devrions donc payer quasiment le même prix pour en avoir deux de moins ! Vous avez manqué à votre parole.
Les accents de colère se répercutèrent sous les hauts plafonds de l'entrepôt. L'homme qui venait de protester de la sorte devait avoir la cinquantaine. Visage massif aux cheveux coupés très court, menton garni d'un collier de barbe touffu, il était vêtu d'une grosse chemise enfilée par-dessus des pantalons informes, le tout caché par un long manteau noirâtre tombant jusqu'à des godillots de l'ancienne armée soviétique.
Il s'exprimait sans difficulté en ourdou, mais avec un accent plus guttural que les natifs du Pakistan.
Il commandait à l'évidence le petit groupe qui faisait face aux vendeurs de la marchandise litigieuse : des missiles sol-air SA-7, dont l'un reposait encore dans une caisse ouverte, protégé par ses supports de polystyrène : un cylindre vert sombre, long comme le bras et à peine plus gros. Les sept autres étaient encore dans leurs caisses, garnies d'étiquettes rédigées en russe, en anglais et en ourdou, aux pieds d'une dizaine d'individus de tous âges. Tous habillés de la même façon, ample et sombre.
Des tubes de néon diffusaient une lumière spectrale, salissant toutes les couleurs.
La corne d'un navire en partance fit vibrer l'air. Par la porte entrebâillée de l'entrepôt, un grondement émaillé de crissements métalliques se répercuta cette fois dans le sol. Un wagonnet que deux hommes poussaient sur des rails, dans des ahans et des cris. Le vent humide et chaud rabattit dans l'entrepôt une fournée des odeurs du quai de Karachi – eau croupie, huile de vidange, mazout, poiscaille – et fit grincer le battant mal fermé.
22 heures : les archimillionnaires de la banlieue chic de Clifton, à l'est, étaient à table dans leurs appartements climatisés. Ils dégustaient, par exemple, un chaud-froid de poulet au curry préparé par un chef payé un salaire de ministre – mais sans les pots-de-vin –, sirotant du puligny-montrachet et échangeant leurs plus récents souvenirs de Londres et de New York, ainsi que des ragots sur les derniers exploits d'Imrat Khan, en écoutant Mustt-Mustt, un « classique » de l'Étoile-la-Plus-Brillante, Nousrat Fateh Ali Khan, le plus grand – et le plus gros – ténor du monde.
Dans les cinémas de Sarwar Shahid Road ou de Zaiboun Niza Street, la jeunesse élégante et comme toujours rebelle était déjà absorbée dans les aventures sirupeuses d'un film de Bollywood. Filles et garçons, ils finiraient la nuit dans un night-club.
Avoir vingt ans à Karachi et des parents riches !
La buée rousse qui nimbait la ville, riche des vapeurs dégagées le plus naturellement du monde par douze millions d'êtres humains – sans compter les rats, un par habitant – et par la chaleur subtropicale, pétillait de néons joyeux entre les gratte-ciel, le Metropolitan Hotel & Four Seasons et les masses victoriennes du Karachi Development Building.
Un homme dans la tenue des gens du peuple, quamis shalwar ou longue chemise sur des braies amples, les pieds nus dans des sandales et le chef coiffé d'un bonnet jadis blanc, glissa un regard à l'intérieur. Personne ne lui prêta attention. La ville grouillait de mendiants qui se faufilaient partout, même la nuit, dans l'espoir d'un bakchich pour le souper.
— Saddik, répondit le chef des vendeurs à son acheteur mécontent, tu sais très bien que nous ne sommes que des intermédiaires. Ce n'est pas nous qui fixons les prix. Ils nous demandent 6 000 dollars, je te transmets leurs exigences.
— Je sais très bien également que tu prends une commission sur les prix, Mourad : 500 dollars. Sur les dix, tu gagnais 5 000 dollars. Sur les huit, tu gagnes 4 800. Pour toi, évidemment, ça ne fait presque pas de différence.
— Je dois payer mes hommes. Le transport. Et d'autres personnes que tu sais. Les SA-7 ne sont pas des armes courantes. Tu m'aurais commandé des AK-47, aucun problème. Mais des missiles dont chacun sait qu'ils servent à abattre des avions... C'est très demandé ces temps-ci.
Saddik fit un pas en avant, le visage toujours crispé.
— Mourad, ce ne sont pas des réfrigérateurs. Ni des ventilateurs. Ce sont des armes sacrées pour nos frères. Pour l'islam ! Tu ne peux pas te comporter comme un marchand. Tu serais un renégat ! Un prévaricateur ! Nous ne sommes pas riches. Nous comptons chaque dollar.
L'accusation de « prévaricateur », l'une des plus infamantes du Coran, fit frémir Mourad. Ses hommes froncèrent les sourcils et tendirent le cou, la bouche prête à l'invective. L'un d'eux s'écria :
— C'est nous tous que tu accuses !
— Oui, c'est vous tous, puisque vous êtes payés par lui ! Vous irez en enfer !
L'un des hommes s'avança.
— Retire ce que tu as dit.
— Je ne retire rien.
L'homme saisit Saddik par le col de sa chemise. Celui-ci mit la main dans sa poche. Des cris jaillirent. La lame d'un couteau brilla.
Alors, l'inconnu qui observait la scène depuis un moment s'approcha.
— Patience ! cria-t-il.
L'algarade s'interrompit un moment. Ils se tournèrent vers lui et le dévisagèrent. La quarantaine, une barbe sombre et un regard perçant.
— La patience est bonne ! répéta-t-il.
Il l'avait dit en arabe : « El sabr taïeb. » C'était une phrase du Prophète qui exigeait le respect, ne fût-ce qu'un instant.
— Qui es-tu ? demanda Mourad avec colère. Qu'est-ce que tu fais ici ? Sortez-le !
Deux de ses hommes saisirent l'intrus par les bras. Mais la curiosité fut plus forte. Que voulait-il dire par « patience » ?
— À quoi doivent servir ces armes ? demanda-t-il en indiquant les caisses.
— Qu'est-ce que ça peut te faire ? s'écria Mourad, à la fois excédé et intrigué par ce ton impérieux.
— Ne lui réponds pas, c'est sans doute un espion ! cria un homme.
— Ces armes sont destinées à défendre l'islam, manant ! répliqua tout de même Saddik.
— Où donc a-t-il été attaqué ?
Saddik haussa les épaules.
— Il est menacé partout par les hommes de Moscou et les Américains.
— Ces armes sont destinées à abattre des avions civils ! déclara l'inconnu avec véhémence. Vous désobéissez à l'injonction du Prophète ! Il a dit : n'attaquez pas les premiers. Dieu hait les agresseurs !
Les acolytes de Saddik et de Mourad fixèrent l'inconnu de leurs regards, interloqués, voire décontenancés.
— Vous prétendez défendre l'islam en contrevenant aux ordres du Prophète ? Vous serez maudits.
— Où a-t-il dit cela ? demanda Saddik en faisant trois pas vers l'homme.
— Dans le livre premier du Coran, ignorant.
Saddik saisit l'inconnu par le col et lui cracha d'une voix mauvaise :
— Qu'est-ce que ça peut te faire, oiseau de malheur ?
— Ça me prouve que tu es un mécréant, Saddik.
— Comment connais-tu mon nom ?
— Je vous l'ai dit, c'est un espion ! répéta l'autre.
— Saddik, reprit l'inconnu, tu te réclames de l'islam pour attaquer le premier. Ces armes sont donc maudi...
Caractéristiques
EAN13 | 9782841876181 |
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ISBN | 978-2-84187-618-1 |
Éditeur | Archipel |
Date de publication | 22 septembre 2004 |
Collection | Roman français |
Nombre de pages | 332 |
Dimensions | 10 x 10 x 2 cm |
Poids | 100 g |
Langue | français |
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