Les Mots bleus de Félicie

Quand certains collectionnent les timbres ou les pins, Félicie Pickle, elle, collectionne les mots. Elle les attrape en plein vol, court après quand il faut, pour les garder dans son grand cahier bleu (et quand elle manque de place dans son cahier, elle les collectionne sur sa basket). Ces mots, qui virevoltent autour d’elle, émanent de ses rencontres : elle voit les mots que les gens n’ont pas assez de place pour garder dans leur tête. Et de ces mots jaillissent de nouveaux mots. Elle sait comment attraper les mots et les garder mais, à son grand désespoir, n’arrive pas à les faire sortir de sa bouche correctement. Soit elle devient muette comme une carpe, soit elle laisse échapper une bêtise… Vous l’avez déjà compris, Félicie n’est pas une petite fille comme les autres. Depuis sa naissance, sa mère, « Mama » de son surnom, la trimballe à travers toute l’Amérique dans son van familial, le Jalapeño, avec sa petite sœur Frannie. Toujours sur la route, ce sont des nomades, de gentils nomades… et si changer d’école tous les six mois est inévitable, pour Félicie, il est bien difficile de se faire des amis. La solitude, elle connaît. Elle a des mots qui lui « collent aux basques » comme le mot « solitaire » qui s’affiche chaque fois qu’elle pousse la porte de la cantine.

Alors quand elles arrivent à Midnight Gluch, la ville d’enfance de sa mère, Félicie fait le vœu d’y rester et de s’y établir… elle qui souffre d’habitude de la solitude, elle s’y sent tout de suite bien, comme si c’était chez elle. Car cette ville est réputée : autrefois, les gens y vivaient heureux, grâce à la magie qui régnait dans le village. « On dit que certains villageois pouvaient attraper des étoiles dans des bocaux à confitures et que d’autres chantaient jusqu’à déclencher un orage ou faisaient pousser des tournesols en dansant ». Chaque fois qu’ils entendaient de la musique, les villageois se levaient et dansaient. Mais rien n’est plus comme avant. Après le duel des « frères Loqueteux » la magie a disparu, comme une malédiction. Le don de Félicie suffira-t-il pour la retrouver ?

Magie, mystère, étoiles… Il suffit d’une page pour se plonger avec délice dans le petit monde de Félicie, héroïne attachante, fantasque, un brin loufoque, qui fait danser les mots. Mais ce récit envoûtant cache un sujet bien plus sérieux : la difficulté de s’intégrer dans la société. C’est un roman sur l’importance des liens familiaux, sur les origines et le bonheur de trouver enfin un foyer. Le don de Félicie nous entraîne dans une ronde de mots effrénée : des mots doux, des mots tendres, des mots tristes, des mots ardus et compliqués, des mots quotidiens ou inusités, des mots étonnants ou passe- partout, des mots qui jouent à cache-cache, des mots qui sentent bon la barbe à papa, des mots qui dansent, qui chantent, et d’autres qui ricanent ou fondent en larmes. Le premier roman de Natalie Lloyd est une petite merveille… Vous reprendrez bien un peu de magie ?

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