YV

Biographie

Je lis, je lis, je lis, depuis longtemps. De tout, mais essentiellement des romans. Pas très original, mais peu de lectures "médiatiques". Mon vrai plaisir est de découvrir des auteurs et/ou des éditeurs peu connus et qui valent le coup.

  • Yv

    Je retrouve avec bonheur l'écriture de Mikaël Hirsch que j'avais déjà appréciée dans "Le Réprouvé" et dans "Les Successions". Dans son dernier roman, il reprend les thèmes de son premier, "Le Réprouvé" : la judaïté, l'écriture et la littérature en tant qu'idéal de vie, la rencontre de deux hommes l'un admirant l'autre pour sa réussite littéraire. S'y ajoute là le mal-être d'un jeune homme brillant, Paul Rubinstein, promis à un bel avenir, mais qui peine à se faire une place dans un monde qui n'est pas le sien. Sa mère est alcoolique, il habite en cité et étudie à Normale Sup' auprès de gens de bonnes familles. Il s'amourache d'une fille, qui, mollement, lui rend la pareille, mais lorsqu'elle s'aperçoit qu'il loge en HLM, elle le quitte tout aussi mollement, sans vraiment le lui dire mais lui s'accroche.

  • Yv

    Soyons direct, c'est un livre difficile. Par le thème qu'il traite bien sûr, mais surtout par l'écriture de Perrine Le Querrec. Totalement déstructurée. Alternance de phrases classiques. Puis des phrases nominales. Puis un mot entre deux points. Ça peut dégoûter. Énerver. Dérouter. Plaire. Enthousiasmer. D'un naturel tolérant, je suis à la fois ravi, enthousiasmé par le style, l'originalité et de l'écriture et de la mise pages (couleurs, tableaux, abécédaires, jeux avec les polices de caractères, les italiques, les gras, ...) et un rien fatigué sur la longueur. Pas aisé de tenir le rythme sur les 234 pages !
    Un roman qui démarre fort, et les premières lignes sont à l'image de la totalité du texte. Soit ça passe soit ça casse :
    "Elle entend. Jeanne. C'est Jeanne L'Étang. Elle arrive. Des feuilles humides. De la terre. La forêt. De l'air. Un cri. Celui de Jeanne L'Étang, née un jour d'octobre 1856. Pluie de feuilles, pluie de sang, pluie de cris. On la prend. On la débarrasse des feuilles. On la serre contre la bouche. "Jeanne ! Ma Jeanne !" On la mouille de sang et de salive. On la nettoie. ­A coups de langue, entre "Jeanne !" et "Jeanne !" Lever les petits bras, nettoyer, là aussi, plis du cou, jambes cerceaux, poings virgules, cheveux noirs. Les yeux, longuement. Jeanne s'envole au bout de deux bras, plonge sous la robe, rencontre la peau. appliquée. Transférée. Jeanne L'Étang a chaud. Elle s'endort contre Dora, Dora sa mère. Un sein au-dessus de ses cheveux noirs. On est à l'abri ici. Il fait chaud." (p.7)
    Si vous passez ces lignes sans encombre, vous êtes prêts pour la suite. Moi, elles m'ont scotché et j'ai donc continué avec envie. Et je n'ai pas été déçu. Vous croiserez dans ce roman, Edgar Degas, le docteur Charcot et même compendieusement Sigmund Freud. Haussmann également ou plutôt sa transformation de Paris : "Perversion, dégénérescence, homosexualité, peur du juif, criminalité, décadence, syphilis, statistiques, population migrante : Paris détruit ses taudis et se reconstruit dans un vocabulaire brutal." (p.21)
    Avis aux amateurs/trices de livres qui sortent de l'ordinaire : laissez-vous tenter, faites-vous votre propre idée.

  • Yv

    Un récit exceptionnel que je ne connaissais pas et que les éditions Audiolib me font découvrir avec bonheur. Ce texte est d'une force peu commune ; tout le cheminement et les questionnements d'un avocat au moment où il aborde un procès qui, il le sait, le changera à tout jamais. Robert Badinter raconte son procès, intercale les conseils de son maître dans ce métier, Henry Torrès, fait le point sur le déroulement de l'affaire pendant les deux premières parties. La troisième étant consacrée plutôt à la demande de grâce et à l'exécution.
    Dans la présentation, Robert Badinter finit en disant : "Fermez les yeux et écoutez", et c'est ce que j'ai fait. La voix de Charles Berling entre dans le casque, paisible au départ, qui enfle lors du procès et devient presque un murmure dans la troisième partie. Si je suis un adepte du livre papier, je dois avouer ici que parfois l'interprétation d'un acteur peut donner de l'ampleur à un texte, quand bien même celui-ci n'en a point besoin. Car, effectivement, le texte se suffit à lui-même, mais Charles Berling lui donne une force supplémentaire. Aucun passage n'est anodin, tant ceux concernant le procès que les conseils du maître Torrès, un vrai plaidoyer pour le métier d'avocat, de défenseur, que la fin, tendue, sensible et inoubliable. Je me souviens encore des débats en 1981 autour de l'abolition de la peine de mort, ceux organisés dans les cours au collège et même encore quelques années après au lycée. Ils étaient vifs, emportés et je défendais fermement ma position, celle qui avait enfin gagné. Je ne m'étais jamais demandé comment Robert Badinter en était venu à croire en l'abolition, j'ai maintenant une réponse claire.
    Merci aux éditions Audiolib de mettre ce texte à leur catalogue, car il doit être lu ou écouté très largement. Cet été, en voiture ou sur la plage, dans l'autoradio ou sur vos lecteurs MP3. Puissant. Encore mieux qu'un bon polar. La praticité d'un format à trimballer partout alliée à l'interprétation formidable de Charles Berling. Pas gai (mais pas pire qu'un thriller, et mieux en terme de qualité) certes, mais inévitable.

  • Yv

    Il y a, il paraît, de nombreux conflits de voisinage en France. Ce roman est d'ailleurs basé sur des faits réels. De petites brimades en gestes plus dangereux, la tension monte et la peur s'installe. Acculée, la victime tente d'alerter bailleur social, police, mais tous sont très occupés à d'autres tâches moins gênantes, pour le premier, et plus valorisantes, pour la seconde. Et Rachel doit alors se débrouiller seule, d'abord contre des petits tracas, avant que ça ne dégénère :

  • Yv

    On rencontre parfois des livres qu'il est bien difficile d'une part de résumer et d'autre part de chroniquer. En voilà un exemple type. Vraiment décalé et barré, j'avoue ne pas trop savoir quoi en dire en débutant mon billet.
    Une chose sûre, c'est que j'ai aimé ce bouquin. le ton est résolument drôle, ironique, un humour que personnellement, j'adore : "Alek trouvait que tous les flics se ressemblaient ; celui-ci ne portait pas la casquette réglementaire, sa chemise sortait de son pantalon, mais il avait bel et bien des moustaches et des lunettes fumées." (p.96) On ne sait pas bien où ça se passe, sans doute en Amérique latine, sous une dictature qui comme toutes les dictatures surveille et impose, et communique par la radio d'État qui n'émet pas très bien.