Matatoune V.
Une vie, en somme, qu’on a plaisir à découvrir !

Porca miseria, dont la traduction est putain de merde, était l’insulte récurrente du père de Tonino Benacquista, Césare ! Et dans ce nouveau récit, il le raconte, lui, qui ne sait que noyer son amertume dans son vin jusqu’au moment où il se couche. Alors, seulement, sa famille peut de nouveau respirer !

Tonino Benacquista raconte aussi sa mère, Eléna, conquise par le cotè frustre de Césare. Telle une « Sabine », il l’enlève, à la vingtaine, et l’emmène en France, espérant trouver la fortune. Mais, là, où son frère ainé parti pour les États-Unis et en revient en Cadillac, Césare, toujours ouvrier, ne peut que glisser des tablettes de chocolat dans les valises de ses quatre enfants pour offrir à ceux qui sont restés.

Deux mots uniques sont prononcés par cette mère : cholestérol et contrariété. Ils évoquent le malaise de cette femme obligée de se laisser guider dans la rue par son fils, âgé alors d’une dizaine d’années. Elle est complétement étouffée et même maltraitée par ses conditions de vie et la maladie de son mari. Ce syndrome du déracinement est décrit avec beaucoup d’émotions tant l’amour du fils transparait dans ces pages. Du coup, ce sont les enfants qui sont l’interface entre ce couple et le monde. Et lorsque ses sœurs partent ainsi que son frère aîné, Tonino Benacquista reste seul avec ces adultes.

En chapitres courts, Tonino Benacquista questionne la manière dont il a grandi, sa terre, son identité face à ses parents qui sont restés à jamais des émigrés. Et, pourtant, leur dernier fils démontre à partir du récit de sa jeunesse, comment il ne s’est senti que français.

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https://vagabondageautourdesoi.com/2022/03/18/tonino-benacquista/

Nathalie P.
La force des mots

Dans son dernier ouvrage, le novelliste et scénariste Tonino Benacquista dévoile ses souvenirs d'enfance. Dernier de la fratrie, né en France de parents immigrés Italiens, cet amoureux de la langue française découvre tardivement le pouvoir et le goût des mots. Sous forme de courts chapitres, il déroule le récit familial : la rencontre de ses parents, l'envie de partir de son père -contrairement à sa mère qui ne supportera jamais ce déracinement- ses grandes sœurs au caractère si différent les unes des autres, les quartiers de banlieue dans les années 60, l'école communale, les étés en Italie, l'alcoolisme qui ronge son père ...
Benacquista est un excellent conteur et un charmeur, il joue avec les mots grâce à une écriture ciselée et imagée et nous offre ici un bel hommage à la France et à la beauté de sa langue.

Elizabeth P.

« Porca miseria » éructe le père bien imbibé avant de s'affaler sur son lit.
Et voilà, première page, le ton est donné.
Ce n'est pas un roman, ce sont des mémoires.
L'auteur repasse sa vie depuis l'enfance, rue de la Gaieté en banlieue parisienne.
Une banlieue d'immigrés italiens.
Son père est ouvrier et alcoolique.
Sa mère est mélancolique à tendance dépressive.
Des parents qui subissent.
Ni l'un ni l'autre ne se sont vraiment mis au français, ce sont le frère et les trois sœurs qui s'occupent de toutes les démarches.
Tonino a subi le désarroi de ses parents.
Le fait qu'ils ne maîtrisent pas la langue l'a freiné.
Il a un mal fou a entrer dans un roman.
En particulier les classiques auxquels il ne comprend rien, croyant lire une langue étrangère.
Lui qui rêve d'écrire.
Il s'attarde sur chaque membre de sa famille, en particulier ses sœurs.
Et cet enfant timide, un peu en retrait, finira par atteindre son but et devenir l'écrivain que l'on connaît.
La magie de la France pour lui, c'est ça : que des illettrés italiens aient pu donner naissance à un écrivain français.
S'il s'est inspiré de son expérience pour écrire ses romans, Tonino Benacquista nous livre ici une nouvelle facette de son talent avec son autobiographie.
Le tout écrit avec une grande sincérité et une grande humilité.