Notre magazine
Dans Le Magazine de Dialogues, retrouvez les épisodes de notre podcast Les Éclaireurs de Dialogues, les vidéos des rencontres filmées des auteurs et autrices invités au café de la librairie, des interviews d’écrivains, d’écrivaines et d’artistes, des actualités, des sélections fouillées sur des thèmes d’actualité, les coups de cœur de vos libraires et conseillers et d’autres surprises qui font vivre la culture sens dessus dessous !
Podcast, Les Éclaireurs de Dialogues
( Voir tout )Gaël Faye, en 2 épisodes
Il est auteur-compositeur-interprète et écrivain, et ses chansons et ses livres se répondent et se nourrissent mutuellement. Il y a d’abord eu l’album Pili Pili sur un croissant au beurre, puis le roman Petit Pays, prix Goncourt des lycéens 2016, les album et ep Lundi méchant et Mauve Jacaranda, et enfin le roman Jacaranda, prix Renaudot 2024. C’est à l’occasion de sa parution que nous avons eu reçu Gaël Faye à Brest pour une rencontre suivie d’une lecture musicale avec Samuel Kamanzi. Un moment suspendu dont vous pourrez entendre plusieurs extraits dans les deux épisodes de notre podcast avec Gaël Faye. Dans le premier épisode, Gaël Faye nous parle de son parcours, entre littérature et musique, et de son rapport à l'écriture, qui résonne avec cet extrait d'un poème de Charles Juliet : “Écrire pour être moins seul. Pour parler à mon semblable. Pour chercher les mots susceptibles de le rejoindre en sa part la plus intime. Des mots qui auront peut-être la chance de le révéler à lui-même. De l'aider à se connaître et à cheminer. Écrire pour mieux vivre. Mieux participer à la vie. Apprendre à mieux aimer.” Gaël Faye est franco-rwandais et a grandi au Burundi avant de devoir fuir le pays après que la guerre y a éclaté. Son histoire familiale est liée à celle du Rwanda, une histoire douloureuse, profondément marquée par le génocide des Tutsi en 1994, remplie de silences aussi, que Gaël Faye dénoue à travers ses deux romans, Petit Pays, et plus encore, Jacaranda. Dans le second épisode de notre podcast avec Gaël Faye, nous plongeons dans Jacaranda. Au fil de la conversation, nous évoquons l'Histoire du Rwanda, la difficulté et l’importance de trouver les mots pour en sonder le récit, et la façon dont la littérature peut être un espace de partage, de transmission, un pas vers l’autre. [ean13_conseils|9782246831457, 9782253070443, 9782843046636 ]
Lire l'articleQue lire avec Dialogues ? Des livres à offrir !
Dans cet épisode, les libraires de Dialogues vous font part de leurs derniers coups de cœur : des livres à offrir, à s'offrir peut-être, et à lire bien sûr ! Voici les livres présentés dans cet épisode : Calvin et Hobbes, la petite intégrale, tome 1, de Bill Watterson (éd. Hors collection) ; Pour une fraction de seconde. La vie mouvementée d'Eadweard Muybridge, de Guy Delisle (éd. Delcourt) ; Rancho Bravo, de Blutch et Jean-Louis Carpon (éd. Cornélius) ; Éclore, d'Aude Mermilliod (éd. Casterman) ; Long London. Tome 1, Le Grand Quand, d'Alan Moore (éd. Bragelonne) ; Terra Ignota. Tome 1, Trop semblable à l'éclair, d'Ada Palmer (éd. Le Livre de poche) ; La Petite Bonne, de Bérénice Pichat (éd. Les Avrils) ; Pour un spatio-féminisme, de Nephtys Zwer (éd. La Découverte) ; Le Voleur d'art, de Michael Finkel (éd. Marchialy) ; Chefs-d'œuvre disparus. Ces trésors que vous ne verrez jamais plus, de Sophie Pujas (éd. Hoëbeke) ; Le Tour du monde du papier, de Julie Auzillon (éd. Pyramyd). [ean13_conseils|9782701404387, 9782413085850, 9782360810581, 9782203243897, 9791028119232, 9782253247357, 9782383110293, 9782348084195, 9782381340555, 9782073075727, 9782350175881 ]
Lire l'articleAnnick Cojean, en 2 épisodes
C'est avec une passion contagieuse qu'Annick Cojean embrasse le métier de journaliste. Grand reporter au journal Le Monde, lauréate du prix Albert Londre en 1996 pour une série de reportages sur les mémoires de la Shoah, autrice de plusieurs ouvrages qui mettent en lumière des vies de femmes et d'hommes qui font face à l'adversité et forcent l'admiration, son parcours est inspirant, son engagement constant, son attention à l'écriture fondamentale. Annick Cojean est l'invitée de notre podcast pour un double épisode à la découverte de son parcours et de ses livres. Et dans ce premier épisode, nous parlons de son métier de journaliste, d'écriture et de l'art de l'interview, en partant d'une phrase qui lui est chère : "Je ne serais pas arrivée là si..." [ean13_conseils|9782246838746, 9782253257530, 9782253941248, 9782253257530, 9782253941248, 9782253174165, 9782246838746 ]
Lire l'articleLes rencontres avec les auteurs et autrices, en vidéo
( Voir tout )Rencontre avec Gaël Faye
Gaël Faye est auteur-compositeur-interprète et écrivain. C’est en 2013 que paraît son premier album solo, "Pili Pili sur un croissant au beurre". Il sera notamment suivi par l’album "Lundi méchant" en 2020, nommé disque d’or, et par l’EP "Mauve Jacaranda" en 2022. Parallèlement, c’est en 2016 que paraît son premier roman, "Petit Pays", qui reçoit le prix Goncourt des lycéens la même année. En cette rentrée littéraire 2024, il publie son deuxième roman, "Jacaranda", lauréat du prix Renaudot. 🎥 Au cours de cette rencontre, qui a eu lieu au cœur de la médiathèque des Capucins, à Brest, Gaël Faye nous présente son nouveau roman, "Jacaranda" (éd. Grasset), un roman profondément bouleversant qui nous plonge dans l’Histoire du Rwanda sur le temps long, Histoire que l’on découvre à travers les yeux de Milan, dont le père est français et la mère rwandaise, et qui a grandi en France. C’est un livre sur le silence, sur les silences qui existent dans les familles après un traumatisme profond, sur la nécessité de les remplir, sur la difficulté de les briser aussi. Et c’est aussi un roman qui est un mouvement vers la vie, qui raconte la façon inédite dont, 30 ans après le génocide des Tutsis, le Rwanda parvient à faire société, malgré les souffrances, la défiance, les traumatismes. L'entretien est suivi d'une lecture musicale de Gaël Faye et Samuel Kamanzi. Un moment suspendu. [ean13_conseils|9782246831457]
Lire l'articleRencontre avec Bernard Lahire
Bernard Lahire est directeur de recherche au CNRS, professeur de sociologie à l'École normale supérieure de Lyon (Centre Max-Weber) et membre senior de l'Institut universitaire de France. Il a publié une vingtaine d'ouvrages, parmi lesquels "L'Homme pluriel" (Nathan, 1998), "Dans les plis singuliers du social" (La Découverte, 2013), "L'Interprétation sociologique des rêves" (La Découverte, 2018) et "Enfances de classe" (Le Seuil, 2019). Au cours de cette rencontre à la librairie Dialogues, il nous présente son nouveau livre, "Les Structures fondamentales des sociétés humaines" (La Découverte, 2024). Et si les sociétés humaines étaient structurées par quelques grandes propriétés de l'espèce et gouvernées par des lois générales ? Et si leurs trajectoires historiques pouvaient mieux se comprendre en les réinscrivant dans une longue histoire évolutive ? Bernard Lahire s'appuie sur des domaines du savoir aussi différents que la biologie évolutive, l'éthologie et l'écologie comportementale, la paléoanthropologie, la préhistoire, l'anthropologie, l'histoire et la sociologie, pour mettre au jour les lois sociologiques qui gouvernent la trajectoire des sociétés humaines par-delà leur diversité. Un ouvrage-somme dont il nous livre quelques clés au cours d'un entretien passionnant. [ean13_conseils|9782348077616]
Lire l'articleConseils de libraires - rentrée littéraire 2024
Laure, Rozenn et Julien, libraires à Dialogues, présentent leurs coups de cœur parmi les 459 nouveautés de la rentrée littéraire 2024. Voici les romans présentés au cours de cette rencontre : Conque, de Perrine Tripier (éd. Gallimard) Badjens, de Delphine Minoui (éd. Seuil) Aux ventres des femmes, d'Huriya (éd. Rue de l'échiquier) Dire Babylone, de Safiya Sinclair (éd. Buchet-Chastel) Madelaine avant l'aube, de Sandrine Collette (éd. JC Lattès) Le Club des enfants perdus, de Rebecca Lighieri (éd. P.O.L) Le Rêve du jaguar, de Miguel Bonnefoy (éd. Rivages) Le Jardin de Georges, de Guénaëlle Daujon (éd. Intervalles) La Barque de Masao, d'Antoine Choplin (éd. Buchet-Chastel) L'Œil de la perdrix, de Christian Astolfi (éd. Le Bruit du monde) Bien-être, de Nathan Hill (éd. Gallimard) La Poète aux mains noires, d'Ingrid Glowacki (éd. L'Arpenteur) La Féerie quotidienne, de Sylvie Patin (éd. Ateliers Henry Dougier) Échappées, de Manon Jouniaux (éd. Grasset) Le Bleu n'abîme pas, d'Anouk Schavelzon (éd. Seuil) Retour à Belfast, de Michael Magee (éd. Albin Michel) Au soir d'Alexandrie, d'Alaa El Aswany (éd. Actes Sud) Les Stripteaseuses ont toujours besoin de conseils juridiques, de Iain Levison (éd. Liana Levi) Si peu, de Marco Lodoli (éd. P.O.L) Alors c'est bien, de Clémentine Mélois (éd. L'Arbalète) Frapper l'épopée, d'Alice Zeniter (éd. Flammarion) Peau-de-Sang, d'Audrée Wilhelmy (éd. Le Tripode) Jacaranda, de Gaël Faye (éd. Grasset) Houris, de Kamel Daoud (éd. Gallimard) Les Âmes féroces, de Marie Vingtras (éd. de l'Olivier) Souviens-toi des abeilles, de Zineb Mekouar (éd. Gallimard) [ean13_conseils|9782073056863, 9782021541724, 9782374254500, 9782283038253, 9782709674539, 9782818061435, 9782743664060, 9782369563501, 9782283038666, 9782386010149, 9782072999901, 9782073082664, 9791031206202, 9782246835745, 9782021562699, 9782226474698, 9782330194208, 9791034909537, 9782818061589, 9782073075031, 9782080440587, 9782370554239, 9782246831457, 9782072999994, 9782823621020, 9782073070296 ]
Lire l'articleLa vie de la librairie Dialogues
( Voir tout )🎅 Nos services de Noël
🎄Préparez vos fêtes de fin d’année avec Dialogues !🎄 La magie de Noël arrive à grands pas, et chez Dialogues, nous mettons tout en œuvre pour vous offrir un accompagnement unique dans la préparation de vos cadeaux. Que vous cherchiez des livres, des jeux, ou des objets originaux, nos équipes passionnées sont là pour vous conseiller et vous aider à trouver des idées qui enchanteront vos proches ! ✨ Découvrez l’univers Dialogues, en magasin et en ligne Pour faciliter vos choix de cadeaux, tout l'univers Dialogues est accessible où que vous soyez : Retrouvez-nous en magasin, où toutes les équipes de Dialogues sont prêtes à vous accueillir et vous aider à trouver le cadeau parfait ! 🎁 Rendez-vous aussi sur nos sites librairiedialogues.fr et lesenfants.fr pour explorer une large sélection d’idées de cadeaux, en livraison à domicile et en Click & Collect. Retrouvez également nos inspirations de Noël sur Instagram : suivez-nous sur @dialogues_brest et @lesenfantsdedialogues_brest pour ne rien manquer de nos recommandations, coups de cœur de nos équipes et sélections festives. ✨ Un catalogue de Noël pour vous inspirer Pour encore plus d’idées, plongez dans notre joli catalogue de Noël, conçu pour vous guider dans vos choix. Que vous soyez en quête d’inspiration ou que vous souhaitiez découvrir nos coups de cœur, ce catalogue est votre allié pour des fêtes réussies ! ✨ Cartes cadeaux : offrez le choix ! Pour être certain·e de faire plaisir, pensez à nos cartes cadeaux, valables 1 an dans toutes les enseignes Dialogues. ✨ Un emballage cadeau solidaire Rendez vos cadeaux encore plus spéciaux grâce à notre service d’emballage ! À la librairie Dialogues et aux Enfants de Dialogues, vos paquets cadeaux seront préparés avec soin par des associations. Un moyen de faire plaisir tout en soutenant des causes locales ! ✨ Flexibilité pour vos échanges et horaires étendus Nous savons que Noël peut être une période chargée, c’est pourquoi nous avons prolongé notre période de retour jusqu’au 11 janvier. Et pour que chacun puisse profiter de nos conseils, nos magasins seront ouverts les deux dimanches avant Noël, avec des horaires d’ouverture élargis sur toute la période de fin d'année. ✨ Date limite de commande et click & collect Afin de recevoir vos livres (et objets) à temps pour les glisser sous le sapin, vous avez jusqu'au 19 décembre pour commander tous les articles en point vert. Le "click and collect" est, quant à lui, disponible jusqu'au 24 décembre inclus.
Lire l'articleEXPO ⎜ Anouck Faure
Cette exposition présente le fruit des collaborations entre l’artiste et romancière Anouck Faure et les éditions Argyll, autour de trois axes : • Le roman La Cité diaphane, d’Anouck Faure plonge le lecteur dans l’atmosphère sombre et gothique de la cité de Roche-Étoile. L’ouvrage est illustré de neuf gravures à l’eau-forte, hommages au romantisme noir et à Gustave Doré. • Le roman Aatea d’Anouck Faure, inspiré des origines insulaires de l’autrice est un récit d’aventure qui interroge la nature de nos racines et de l’exil. Celui-ci est accompagné d’une quinzaine d’illustrations à l’encre de Chine, ici reproduites sous forme de tirages d’art. • La collection de récits courts RéciFs, lancée par Argyll en septembre 2024, qui met en avant des autrices aux plumes flamboyantes, abrasives, engagées ou poétiques. Toutes les couvertures sont réalisées par Anouck Faure, à l’encre de Chine agrémentée de couleurs numériques. Anouck Faure est une artiste plasticienne, autrice et illustratrice originaire de Nouvelle-Calédonie. Ses dessins, récits et gravures tissent un univers enchevêtré où se côtoient décors démesurés, nature chaotique et cosmogonies. Ses ouvrages vont de la poésie océanienne au roman gothique. Elle réalise également des couvertures et illustrations pour divers éditeurs, utilisant des techniques traditionnelles telles que l’eau-forte sur cuivre. Elle remporte en 2024 le Grand Prix de l’Imaginaire pour son travail graphique. Site internet : anouckfaure.com - Instagram : anouckfaure Les éditions Argyll sont une maison basée à Rennes, engagée dans une démarche éthique et solidaire. Elle publie des histoires fortes et prenantes, avec un tramage social important, et ce, qu’elles appartiennent au roman historique, au roman policier ou, surtout, à l’Imaginaire (science-fiction, fantastique, fantasy). A plusieurs niveaux, Argyll cherche à montrer que l’imaginaire, au travers de la fiction, est un outil essentiel à notre réalité, à notre compréhension du monde. L’imaginaire est un biais, un pas de côté. Une façon de réfléchir le monde de demain. Site internet : argyll.fr - Instagram : argylleditions Retrouvez Anouck Faure en rencontre à la librairie le 9 janvier 2025 à 18h. Son nouveau roman Aetea y sera disponible en avant-première.
Lire l'articleL'été sera stylet : Kwassas, Emilie Provost
Alors que Brest accueillait cet été la 8ème édition de ses emblématiques Fêtes maritimes, la librairie Dialogues invitait chacun et chacune, pour la deuxième année, à écrire un texte court autour du thème de la mer et commençant par la phrase « Est-ce le début ou la fin d'un voyage ? Un bateau...» Cette deuxième édition a inspiré les passionné(e)s d'écriture puisque pas moins de 90 participant(e)s ont tente leur chance. Libres dans le style et le genre littéraire, ils avaient pour consigne d'écrire un texte de 6 500 signes maximum. Émilie Provost, notre grande gagnante, écrit d'abord pour elle. Ce sont les histoires terribles des migrants qui l'ont poussée à prendre la plume, afin "d'exorciser les choses pour [elle], pour eux, et surtout pour que ça se sache...". Vous pouvez lire son texte > ICI < ou juste après. Kwassas Emilie Provost Est-ce le début ou la fin d'un voyage ? Un bateau prend la mer ce soir. II part de Anjouan, le ventre rempli d'âmes apeurées rêvant de liberté. Il y a cet homme, jeune, si pâle derrière sa peau noire. II est malade, son carnet de santé si précieux est glissé dans une pochette plastique, pour le protéger de l'eau. Il lui sera indispensable de l'autre côté. Près de lui, une femme qui a mal. Sa poitrine lui est extrêmement douloureuse depuis plusieurs mois, elle a grossi, est déformée et lourde. Elle a fini par rassembler assez d'argent pour consulter aux Comores : « nous ne pouvons rien pour vous » rejoignez la France. Près d'eux une autre femme tient son enfant dans ses bras. Un trésor de quelques mois violemment jeté à terre par un adolescent voilà quelques jours. Malgré tous les efforts entrepris il ne peut pas être soigné de ce côté là du monde, mais à 70km, il y a un morceau de France... A 70km il y a Mayotte : l'oubliée de l'Etat français, mais c'est un département et surtout pour toutes ces âmes, et les autres, celles que je ne connais pas, entassées sur ce bateau, c'est l'espoir. L'espoir d'une vie nouvelle, de soins, de guérison, d'une famille retrouvée, d'une vie meilleure. Mais avant d'atteindre cet eldorado, il y a la traversée... La mer est mauvaise en cette saison, j'imagine leurs regards échangés : y arriveront-ils tous ? Y arriveront-ils tous vivants ? Le plus beau lagon du monde est aussi le décor pour la traversée de voyageurs cachés et déshumanisés, traversant l'océan Indien dans la peur d'être reconduits à la frontière. Certains arriveront trempés, ensablés, couverts d'urines et de matières fécales, humiliés. D'autres n'y arriveront jamais. Qui ? Je ne sais pas. La misère ici, dans l'eau n'a pas de nom. Et quand les poissons s'en mêlent, la seule chose que l'on peut leur rendre c'est une sépulture. Et la paix. Je vois Anjouan, si près. Ils voient Mayotte, forcément. Pour beaucoup d'entre eux, le départ, c'est l'espoir. C'est se donner la chance de survivre, si près. Quand à 22 ans on est face à la maladie, on a envie de la battre, de croquer la vie et de manger tout ce qu'elle a à nous offrir. De retrouver son pays, son ile, sa famille, son amoureuse et ses amis pour des parties de foot dans les cris et les rires qui finiront forcément avec des clous dans les pieds. A 22 ans et à tout âge on veut retrouver les couleurs de l'aube et admirer encore et toujours le soleil rose qui tombe le soir dans l'océan Indien. Quand Maansoir vient, il vient sauver sa peau, avec l'énergie du désespoir. En arrivant il n'a pas de nom, il est sidéré, gelé et bien trop épuisé pour nous parler... Ses papiers et son si précieux carnet de santé lui ont été volés quand il était trop faible pour quitter cette plage sur laquelle il a débarqué. Quelqu'un l'a déposé au dispensaire, probablement clandestin aussi et dans la peur, il est parti... Quand cette mère porte son trésor tout contre elle dans le froid et la nuit du bateau, elle sait ce qui peut arriver. S'il pleure, il peut faire repérer le bateau, ils risquent leur vie tous les deux. Mais ce voyage est une nécessité, un non choix, pour ce bébé à la tête fracassée. Quand je vois la femme, elle tient sa poitrine, elle fait si âgée... Elle est si fatiguée et sa voix si fluette. Nous ne parlons pas la même langue, on ne lui a rien dit dans son pays. C'est donc dans une langue que je ne partage pas avec elle que je lui annonce qu'elle a un cancer. Je lui dis aussi que si elle a du mal à respirer c'est qu'il n'est pas resté dans son sein mais qu'il a aussi touché son poumon. Elle verra demain le cancérologue, les choses sont lancées... Quant à Maansoir ? Son frère est revenu plus tard, inquiet, avec son nom et une partie de son histoire: des gros problèmes de sang, c'est pour ça qu'il a traversé l'Océan. Maansoir a récupéré son nom et il est mort. Lorsque l'hélicoptère le transférant à Mamoudzou s'est posé, son coeur s'est arrêté. Le Petit Trésor et sa maman sont arrivés aussi. C'est grave, son cerveau sort de sa boîte crânienne... Il doit être opéré, mais nous n'avons pas les compétences ici. Lui et son merveilleux sourire sans dent sont transportés à La Réunion, je ne sais pas ce qu'ils sont devenus. Et moi là dedans ? La misère je l'ai vue d'en face. Elle est violente et intolérable. Elle a un visage. que dis-je mille visages. Pas trois dans un bateau. Ce sont des dizaines de visages, des dizaines d'histoires dans des dizaines de bateaux... Des hommes, des femmes et des enfants qui partent pour un voyage dangereux au péril de leur vie. J'aimerais qu'ils retrouvent une humanité, une dignité et le soulagement; un nom, le droit d'être là, le droit d'exister, dans cette vie et dans l'autre.
Lire l'articleNos grands entretiens
( Voir tout )Nancy Huston et Francia, Lignes de failles de notre société
Électron libre de la scène littéraire, l’écrivaine franco-canadienne Nancy Huston est l’autrice de romans, essais, pièces de théâtre et d’un recueil de poèmes. Depuis son premier roman, Les Variations Goldberg, elle est traversée par les voix de nombreux personnages qui forgent et interrogent notre regard sur la société. Son nouveau roman, Francia, s’inscrit dans cette lignée, en nous plongeant dans le quotidien d’une travailleuse du sexe transsexuelle au bois de Boulogne. Entretien mené par Laurence. D’où est venu ce roman ? C’est une première dans mon histoire littéraire : ce roman est presque né d’une commande. Un ami, ancien médiathécaire, m’a dit : « Je participe depuis des années aux maraudes dans le bois de Boulogne, et c’est vraiment un univers très impressionnant. Là, il y a un roman à faire et c’est toi qui dois le faire. » Je crois qu’il devait savoir que je travaillais sur Grisélidis* à ce moment-là. Au début, j’ai dit non. Et en même temps, ça m’interrogeait que je ne me sente pas concernée par les trans. J’ai donc rappelé quelques mois plus tard, et j’ai dit : « Oui, je vais venir. J’aimerais bien au moins voir la forêt la nuit, avec vous. » C’était avec une association sous l’égide de l’Église catholique, Magdalena, comme dans le roman. Et cette nuit-là, on était au mois de novembre et il faisait très froid. Même à l’intérieur du camion, on avait nos manteaux. Alors de voir ces femmes quasi-nues à l’extérieur, c’était déjà impressionnant. Plusieurs sont montées dans la camionnette discuter avec nous, et j’ai découvert leur niaque, leur sens de l’humour, leur gentillesse, leur solidarité. L’ambiance est finalement beaucoup plus positive que dans les rues de Paris un jour lambda. Je les ai trouvées étonnantes et ça ne s’est jamais démenti. J’ai fait pas mal de maraudes par la suite, et le personnage de Francia a commencé à se cristalliser. J’ai interviewé plusieurs personnes, et j’ai décidé qu’elle devait être colombienne pour des raisons autres, qui ont à voir avec des amis à moi, colombiens, que j’avais envie d’interroger aussi. Donc je suis allée là-bas pour essayer d’imaginer son enfance, comme petit garçon dans la ville de Girardot, j’ai appris un peu l’espagnol, j’ai engagé une jeune prof colombienne pour apprendre avec l’accent. Voilà. Et j’ai avancé un petit peu à tâtons, mais j’avais décidé dès le début qu’il fallait 17 clients. Ça, c’était une décision de mon « dictateur ». Heureusement que j’ai un dictateur, une voix interne, qui donne au départ de chaque roman quelques instructions très précises. Et le titre Francia s’est imposé tout de suite, parce que je voulais aussi qu’à travers les 17 clients de ce jour-là, nous ayons une sorte de mosaïque de la France contemporaine. Ce titre, Francia, c’est aussi le nom du personnage principal. Comment s’est-elle dessinée sous votre plume ? C’est un processus mystérieux, heureusement. Je ne peux pas expliquer exactement comment cela se passe. Nous faisons tous un peu la même chose la nuit, dans nos rêves, nous inventons des personnages, il y a des créatures qui surgissent comme ça. L’idée de la claudication du personnage est venue très tôt, c’était une décision absolument sûre dès le début. Mais par exemple, je ne savais pas ce qui avait causé ce boitillement, je l’ai appris plus tard. Et c’est comme ça, l’écriture de romans. Ça peut paraître étrange pour les gens qui n’y sont pas, mais nous pouvons tout à fait nous poser une question à propos d’un personnage, un être humain qui n’existe pas, et recevoir la réponse juste. Parfois il faut attendre longtemps. Ce roman est né des maraudes que vous avez faites, de rencontres… Comment avez-vous alors abordé la question de la justesse ? Est-ce qu’il s’agissait d’intégrer vos témoins dans le processus de l’écriture ? Non, je ne pouvais pas tellement faire lire au fur et à mesure. Maintenant, il y en a qui le lisent, qui l’ont lu, et qui - heureusement pour moi, je suis très soulagée - l’aiment bien. Mais c’est quelque chose de… c’est le métier. Je suis vraiment une romancière professionnelle et donc je fais confiance à cette logique. Et je sais quand je me trompe. C’est étonnant ! Par exemple, dans la première version, la première scène où j’apparais, dans la camionnette sous le nom de « La Griffonne » - parce que je suis présente dans le livre de temps en temps, je surgis au milieu des personnages -, il y a une des femmes qui est très méfiante et très cassante. Dans la première version, c’était Francia. Et puis, au bout de quelques mois, j’ai compris qu’elle était incapable de parler comme ça. Parce que j’avais construit le personnage de la grand-mère entretemps, parce que je savais que cette grand-mère lui avait appris les valeurs essentielles de la vie : la douceur, l’écoute, et une certaine relation à Dieu. Une relation très heureuse, j’ai envie de dire, qui consiste à pouvoir poser ses soucis, à demander à Dieu que la famille aille bien, que les gens se pardonnent, etc. C’est très doux comme christianisme. Ce n’est pas du tout quelque chose de sévère et de raide comme peut l’être le catholicisme dans d’autres contextes. Donc c’est curieux comme livre parce qu’il y a par exemple des clients qui ont des diatribes anticatholiques d’un côté, et puis ce personnage principal, central, qui elle-même est profondément pieuse, croyante, pratiquante. Et quelque part, je me sens plus proche intellectuellement de ceux qui attaquent l’Église, mais mon cœur va complètement avec Francia. Et je n’ai aucune difficulté, étrangement, à construire quelqu’un qui est croyante de cette façon-là. Et pas seulement à la construire mais à l’aimer. Dans le roman, il y a aussi 17 autres voix d’hommes que vous faites exister au plus près de leurs fêlures, et qui sont une ébauche de notre société, des non-dits qui la traversent et la tiennent. Que s’agissait-il de dire, grâce à ces voix ? Je trouvais qu’il fallait restituer l’autre moitié du tableau, tout simplement, dont on ne parle jamais. Quand j’interrogeais les femmes pour savoir qui étaient les clients, elles avaient toutes la même réponse exactement : « C’est tout le monde. » Et puis, grâce à Grisélidis aussi, j’ai réfléchi de plus en plus pour me demander : « Mais, pourquoi est-ce qu’on méprise les prostituées ? Qu’est-ce qui est honteux, au juste ? Qui est lésé dans cette affaire ? » Et j’ai compris que la haine de la prostituée, c’est la haine de la sexualité féminine tout simplement. Or, dans la prostitution, il n’est jamais question de sexualité féminine. C’est ça qu’on met en scène dans des films, dans la pornographie, bien sûr, dans des tableaux, dans toutes les représentations, c’est cette féminité soi-disant exhibitionniste, obscène, avec les mimiques, les attitudes... Et tout ça, ce sont les fantasmes des hommes. En réalité, il est question de sexualité masculine, et c’est de ça qu’on ne parle jamais quand on parle de prostitution. C’est la demande qui crée la prostitution, ce n’est pas l’offre. L’offre correspond à un besoin d’argent simplement. Tous ces hommes qui traversent le roman, on découvre leurs pensées dans des moments de vérité, dans la mesure où ils sont hors de vue de la société. Comment est-ce qu’en tant que romancière, on investit cet espace de liberté, en dehors de toute question de bienséance ? Est-ce qu’il s’agissait de se tenir au plus près des personnages, et de ne surtout pas les juger ? Oui, je n’invente pas un personnage pour le ridiculiser, pour le tourner en bourrique. Je n’aime pas les charges, les caricatures. J’aime bien quand c’est drôle, donc c’est souvent assez comique, par certains côtés, chacun à sa manière, mais c’est parce que les pensées qui leur traversent l’esprit peuvent être cocasses. C’est comme dans Les Variations Goldberg, c’est ce que j’ai appris à faire. Comme je le dis, moi c’est plutôt « pute de cerveau » : depuis toujours, je me laisse pénétrer par des inconnus. Sans doute parce que, petite, j’étais toujours la nouvelle, à l’école. Je devais toujours me mettre à la place des autres pour voir comment ils me voyaient, qu’est-ce que je devais faire, quelles étaient les valeurs en vogue ici, etc. Et donc je n’ai pas UNE langue française, par exemple, à moi. J’imite celle des autres, je ne parle pas des accents mais des façons d’utiliser la langue. J’écoute. L’ouïe est mon sens le plus aigu. Francia raconte aussi le quotidien des travailleuses du sexe au bois de Boulogne, et c’est un monde où il y a beaucoup de violence. Était-ce difficile à traiter dans le roman, cette question de la violence ? Au moment où j’ai vraiment commencé à écrire le livre, il y a eu le procès des tueurs de Vanesa Campos, et j’ai assisté à ce procès. C’était en deux fois, d’abord au Palais de Justice dans l’île de la Cité, et ensuite en appel au tribunal d’instance de Créteil. Deux semaines la première fois, trois semaines la deuxième. Et j’ai été très frappée par le contraste entre ces bâtiments, surtout l’ancien Palais de Justice au centre de Paris, qui est le symbole même de tout ce que valorise la République, avec ses statues de la Renaissance, les fresques sur les murs, l’architecture imposante, les juges avec l’hermine, et nous étions là à évoquer un univers de sperme, de sang, de boue, de flingues, de vol, de viol, d’étranglement, etc. Vanesa Campos était une travailleuse du sexe transgenre péruvienne, qui a été tuée avec l’arme de service d’un policier. Quinze jours avant le crime, il avait laissée cette arme dans sa voiture pour être lui-même client. Il y avait une telle densité d’extrêmes réunis dans la même pièce, et je me suis dit, les gens ne veulent pas regarder ces marges et les comprendre, et comprendre à quel point le fonctionnement de notre société, de notre civilisation, dépend aussi de ces travailleurs et travailleuses du sexe. Et la France est très en retard dans ce domaine, comme elle a été un des derniers pays à accorder le droit de vote aux femmes, c’est un des derniers pays à comprendre l’importance de respecter les travailleurs et travailleuses du sexe. Il y a des pays beaucoup plus avancés sur ce thème. La France en est encore à pénaliser les clients alors que toutes les études montrent que dans les pays où les clients sont pénalisés, le taux de viol augmente systématiquement. Peut-on dire que Francia est un roman politique, dans le sens où il change notre regard sur le monde ? Je l’espère, oui. Quelqu’un a dit récemment : « C’est un livre-monde ». Eh bien, c’est un peu l’ambition, oui, c’est sûr. Et « La Griffonne », fallait-il des années d’expérience d’écriture pour la laisser entrer ? Sans doute. Oui. J’ai essayé de le faire avec L’Empreinte de l’ange il y a 25 ans, j’avais une version où je racontais aussi mon histoire, je glissais ça et là des comparaisons entre moi et le personnage principal. Mais mes éditeurs ont dit: « Non, ça distrait. L’autre histoire est tellement intense, il ne faut pas qu’il y ait ces distractions. » Et ici, je me suis dit : « Je me lance, c’est trop tentant. » J’ai fait plusieurs scènes comme ça, puis je les ai supprimées. Mes éditeurs ont tous réclamé davantage, donc je les ai ressuscitées. Et voilà. C’est vrai qu’on a besoin de rigoler de temps en temps, parce que c’est un monde dur. Très dur. J’étais en train de lire, à l’instant, une citation d’Ernest Renan : « Une philosophie perverse sans doute me portait à croire que le bien et le mal, la joie et la douleur, le beau et le laid, la raison et la folie, se transforment les uns dans les autres par des nuances aussi indiscernables que celles du cou de la colombe. » C’est beau, ça. Rousseau disait la même chose : « Bien et mal coulent de même source. » Et Romain Gary aussi, c’est vraiment une chose qui le hantait, qu’il appelait le couple infernal. Le meilleur et le pire sont inséparables. Et effectivement, je pense que si on a un monde où tout le monde est gentil et sympathique et généreux et adorable, il n’y aura plus besoin de littérature. Pour découvrir la bibliothèque idéale de Nancy Huston, cliquez ici ! [ean13_conseils|9782330188764]
Lire l'articleCamille Blandin, "Rigoler, ça fait du bien !"
Sport oblige (ou pas !), on a souhaité aller à la rencontre de Camille Blandin qui sort une BD drôlissime, On est en finale, aux éditions Misma. L’histoire d’une équipe de basket rurale qui arrive en finale départementale sur une série de malentendus ! Jeune illustrateur et auteur de trois bandes dessinées – Rien à feutre, Papa ou le Francky et On est en finale –, à la tête d’une communauté de plus de 60 000 personnes sur Instagram, Camille Blandin répond à nos questions ! Pourriez-vous nous raconter à quel moment la bande dessinée est entrée dans votre vie ? J’ai toujours dessiné, et je voulais déjà être auteur de BD quand j’étais au collège. En entrant aux Beaux-Arts de Toulouse, j’ai découvert énormément de pratiques et de techniques qui m’ont éloigné, un temps, de la bande dessinée. J’y suis revenu assez naturellement en fin de cursus, avec d’abord mon mémoire de fin d’études de graphisme sur la question sonore en BD, puis le lancement de mon compte Instagram. Rien à feutre met en scène des strips sur une page, Papa ou le Francky développe des saynètes sur plusieurs pages, On est en finale est une histoire au long cours. Comment est né ce dernier projet ? En réalité, ce livre est une réécriture d’une BD que j’avais justement faite en fin d’études. Elle faisait environ 120 pages, et était beaucoup plus sommaire que la version publiée. Je l’avais quand même imprimée (en deux exemplaires, budget étudiant oblige), juste pour le plaisir d’avoir l’objet. J’ai eu envie de reprendre ce projet, en l’étoffant d’un point de vue narratif et visuel, avec l’ajout d’un public, de plusieurs personnages secondaires, une vraie unité de lieu… Le grand public vous a découvert sur votre compte Instagram, @Strrripclub. Que représente ce compte Insta pour vous ? C’est assez évident pour moi que c’est ce qui m’a permis de me lancer dans la BD, d’avoir une première visibilité dans ce milieu. Je vois Instagram comme un outil de diffusion, mais j’essaie de ne pas aller au-delà. Jouer le jeu des algorithmes me prend trop la tête, je n’ouvre jamais la section « statistiques » du compte, parce que si je vois une baisse, j’ai l’impression que ça y est, tout est fini, les gens m’ont oublié, je prépare ma reconversion. D’ailleurs là, j’ai commencé un CAP aéronautique parce que mon dernier post a pas trop marché. J’ai peur de l’avion en plus… Dans On est en finale, on rit beaucoup ! L’humour, quelle signification, et quel pouvoir il a ici, pour vous ? Rigoler, ça fait du bien. Mon objectif n°1 est de faire rire les gens. Même si en lisant mes livres, on a une idée assez claire de mes opinions politiques, sociales, écologiques, ce ne sont pas des sujets que je développe énormément. Ça m’a souvent questionné. Mais je crois qu’essayer de faire rire les gens, même sur des sujets très simples ou absurdes, c’est une forme d’engagement. À un moment de l’album, vous tentez un nouveau style de dessin, et on vous voit même apparaître : vous rompez la convention (et vous râlez aussi !). La bande dessinée est-elle un territoire de jeu idéal ? De mon point de vue, c’est en effet un super outil pour créer du lien. Justement parce que je me nourris du quotidien dans mon travail, du vécu de tout le monde, de scènes banales. Papa ou le Francky a forcément fait écho à d’autres papas. Et puis j’aime parler de là où j’ai grandi, c’était important pour moi d’inscrire On est en finale dans un milieu très rural, et je crois que ça permet aussi à des personnes de s’identifier à ça. Mes personnages et mes lieux ne sont pas fantasmés, tout est assez ancré dans le réel (enfin sauf quand je dessine des loups-garous et des vampires mais bref). Votre regard est très tendre, malgré l’humour - peut-être même grâce à l’humour. Peut-on vivre sans tendresse ? « On peut vivre sans la gloire, qui ne prouve rien. Être inconnu dans l’Histoire et s’en trouver bien. Mais vivre sans tendresse, il n’en est pas question… » Bourvil. Je mets des citations, ça fait intelligent, en plus c’est la chanson préférée de mon papy. Bien sûr qu’on ne peut pas vivre sans tendresse ! La preuve : dans On est en finale, ce n’était même pas une volonté de ma part. Ça vient naturellement. [ean13_conseils|9782494740044,9782492926266,9782377541461]
Lire l'articleAnnick Cojean, le D-Day heure par heure par ceux et celles qui l'ont vécu...
Le 6 juin 2024 marque les 80 ans du Débarquement. Plus grande opération militaire de l’Histoire, c’est aussi une aventure profondément humaine. C’est dans cette dimension que nous plonge le nouveau livre d’Annick Cojean, Nous y étions, grâce aux voix de 18 témoins qui nous racontent ce jour, le plus long et le plus important de leur vie. Dans Nous y étions, vous nous faites revivre heure par heure le D-Day, grâce aux voix de 18 hommes et femmes qui l’ont vécu. En quoi est-il essentiel, aujourd’hui, de continuer de faire vivre cette mémoire ? Le 6 juin 1944 a été un tournant majeur de la Seconde Guerre mondiale. L’enjeu était colossal et a exigé des sacrifices terribles... au nom du combat contre le fascisme et pour la liberté. Il est donc juste qu’on reconnaisse le courage insensé dont ont fait preuve les hommes qui y ont contribué. Comme il me semble vital que l’on se souvienne que la liberté n’est pas un bien inné, acquis, naturel, évident. Qu’il a fallu la conquérir, se battre pour la défendre et la conserver. Son prix a été exorbitant. Elle est précieuse, mais si fragile. Il importe donc, toujours, d’être vigilant. C’est un livre qui vient de loin d’une série d’articles parue dans Le Monde en 1994, d’une longue enquête qui les a précédés, de souvenirs d’enfance aussi et des récits de votre maman. Pourriez-vous nous raconter le chemin qui vous y a mené ? Ma mère, petite fille, habitait Caen au moment du Débarquement. Sa maison a été bombardée, sa famille, comme des milliers d’autres, a dû prendre le chemin de l’exode. Elle a vécu alors mille événements qui sont entrés dans la légende familiale car c’était une merveilleuse conteuse. J’ai donc toujours vécu avec « l’épopée » du Débarquement. Quand s’est approché son 50e anniversaire, j’ai souhaité retrouver les combattants - Américains, Anglais, Canadiens... et même Allemands - qu’elle aurait pu croiser. Je voulais les rencontrer, et les entendre me raconter l’histoire avec leurs mots, leurs images, leurs émotions. Je voulais ressentir le souffle du D-Day et revivre cette histoire d’aussi près que possible. Être avec eux sur les plages, dans un planeur, un hélico... voire même dans un blockhaus. Les 18 témoins dont vous retranscrivez les voix ne sont pas tous du même camp, ont eu des rôles, et des vécus différents. Mais ce qui les relie tous, c’est que ce jour les a marqués à tout jamais. De quelle manière, avec quelles émotions, vous ont-ils alors livré leurs récits ? Ils replongeaient dans le temps avec une facilité inouïe. Ils avaient à nouveau 18, 20, 22 ans. Une maman à qui ils pensaient, plus souvent qu’à une fiancée. Une foi chancelante mais que réveillaient les premiers coups de canon. L’envie d’en découdre et de servir leur pays. Mais ils avaient peur aussi. Terriblement peur devant le feu et la mitraille; la mort qui pouvait les cueillir à tout moment et à laquelle, pour la plupart, ils n’avaient jamais été confrontés. Leur propre mort devenait envisageable, ils s’y résignaient presque. Celle de leurs camarades en revanche était insupportable. Les scènes d’apocalypse vécues sur les plages, aux premières heures du D-Day, demeuraient à jamais gravées dans leur rétine. Parmi les témoins, plusieurs évoquent l’incommunicabilité de ce que l’on vit à la guerre, les liens inébranlables et la complicité éternelle entre les frères d’armes, mais aussi le fait que les larmes n’étaient pas présentes au front, mais sont venues des années plus tard. Comment avez-vous alors procédé pour faire remonter ces souvenirs en douceur, et fallait-il pour cela de longs temps d’interview, de nombreux entretiens ? On ne pleurait pas sur le champ de bataille et malgré les souffrances. Mais au cours des interviews, les larmes affluaient souvent. «C’est incroyable comme elles viennent facilement!» s’excusait un vieux soldat. « C’est comme si on avait gardé toute cette eau pour plus tard... » Les souvenirs abondaient, je n’avais guère de mal à faire parler mes vétérans. Très pudiques au départ, si inquiets de lasser, ils se prenaient au jeu et me sortaient de vieilles photos, des cartes, des médailles, un morceau de parachute ou un foulard de soie représentant la carte de France pour qu’ils ne s’égarent pas... Des trésors que certains n’avaient encore jamais vraiment montrés. Ils étaient heureux de parler. Oui, heureux d’être considérés et écoutés. Dans tous ces témoignages, on découvre du courage, une volonté de bien faire, un respect de la hiérarchie, de la camaraderie, une certaine foi aussi, et partout, un sentiment: celui d’une guerre « juste ». En quoi était-elle fondamentale, cette notion de guerre juste ? C’est vrai, du côté des alliés la conviction de mener une guerre juste était unanimement partagée. Ils n’avaient pas de doute et faisaient confiance à leurs gouvernements qui présentaient l’opération comme une lutte morale opposant le bien et le mal. Ils se pensaient du bon côté de l’Histoire. Eisenhower, en s’adressant à eux, la veille du D-Day, avait parlé de « grande croisade » et lancé : « Les espoirs, les prières des peuples épris de liberté vous accompagnent. » Cela les galvanisait. La situation était toute autre côté allemand, du moins chez les très jeunes soldats qui, pour la plupart, avaient été enrôlés de force dans la Wehrmacht et n’adhéraient pas au nazisme. Au fil de la lecture de ces témoignages, on prend aussi la mesure de l’opération exceptionnelle et d’immense envergure qu’a été le D-Day. On réalise que rien n’était gagné d’avance, que toute l’opération avait été prévue à la minute près, et que définir sa date était loin d’être évident. Comment cette date du 6 juin s’est-elle alors imposée ? Le D-Day est une opération d’une précision mécanique époustouflante. Elle a été précédée de mois, voire d’années d’entraînement, et on ignore souvent que davantage de vies ont été perdues dans la préparation du D-Day que lors de la journée elle-même. Quant au choix de la date, ce fut l’objet d’un véritable casse-tête. La marine exigeait un débarquement à marée basse, car il fallait pouvoir distinguer sur les plages les nombreux obstacles diaboliques disposés par le maréchal Rommel. Elle souhaitait aussi un assaut à l’aube, afin de pouvoir approcher des côtes françaises sous le couvert de la nuit. Les généraux parachutistes, eux, demandaient la pleine lune pour que les hommes puissent repérer le sol. Le créneau était donc très étroit. Sans compter la nécessité du beau temps, tout au moins l’absence de tempête qui ficherait la pagaille... Or voilà qu’elle s’est levée dans les premiers jours de juin, potentiellement dévastatrice, forçant Einsenhower à différer d’un jour le Débarquement initialement fixé au 5 juin. Dans ce livre, on plonge dans l’histoire en marche en ce 6 juin, et on découvre aussi de nombreuses anecdotes. On apprend par exemple que des archers accompa- gnaient les missions commando de repérage en amont du D-Day ; on se rappelle aussi qu’un joueur de cornemuse était présent et jouait sur le champ de bataille... Quelle est celle qui vous a le plus marquée ? Il y a tant d’histoires qui m’ont subjuguée ! Bill Millin, la cornemuse de Lord Lowat, qui tient à débarquer en kilt sur la plage, digne et impérial malgré la mitraille, soucieux de jouer les grands airs de circonstance. Le ranger magnifique de la Pointe du Hoc qui supplie de ne pas croire les affirmations de Cornélius Ryan, l’auteur du Jour le plus long, selon lequel la mission avait quasiment échoué puisque les canons allemands qui justifiaient cette mission-suicide n’existaient pas... alors que c’est lui-même les a démantelés. Et puis Charles Lynch, le plus jeune correspondant de guerre du D-Day qui débarque avec sa machine à écrire et une quinzaine de pigeons voyageurs ! Dans cette histoire, il y a aussi des traumatismes qui ne passent pas. Ainsi, l’un des témoins a mis des décennies à se remettre de son stress post-traumatique. Un autre parle de l’opération Tiger, qui a mal tourné, quelques semaines avant le débarquement. Des témoins polonais et allemand, pour des raisons différentes, disent aussi la difficulté à accepter la façon dont l’Histoire a été racontée après. En quoi était-il important de faire entendre aussi ces voix-là ? Toutes les voix m’intéressaient ! Tous les points de vue, toutes les perspectives, toutes les subjectivités. La guerre est racontée ici sous l’angle personnel et terriblement humain. Et chacun livre son expérience sans le filtre des généraux ou la censure militaire qui a obligé à passer sous silence des épisodes peu glorieux voire infiniment douloureux. Tous les récits des témoins sont écrits à la première personne, et de véritables voix transparaissent, au plus près desquelles on se tient. De quelle manière vous suivent-elles et vous accompagnent-elles, ces voix, après l’écriture de ce livre ? Et quel lien, quels souvenirs gardez-vous de ces témoins, de ces rencontres ? J’avais longtemps gardé un lien avec quelques-uns de ces vétérans. L’un m’écrivait régulièrement, l’autre m’invitait à déjeuner lorsqu’il passait à Paris. Hélas, la précieuse armoire dans laquelle je gardais au Monde tous mes petits carnets a disparu, lors d’un déménagement de mon journal. Et j’ai perdu mon trésor. Il me reste quelques photos, glissées dans mon album de famille: l’une prise à New York avec un ranger américain, une autre à Montparnasse avec mon joueur de cornemuse qui avait revêtu son kilt pour être sûr que je le reconnaisse, une autre en Normandie, entourée de Canadiens, le 6 juin 1994... Ces souvenirs me sont chers et restent indissociables de mon lien très fort avec ma mère, ma conteuse merveilleuse du Débarquement. [ean13_conseils|9782246838746,9782364452626,9782737388880,9782021542158,9782824622156,9791040405320,9782253108443,9782253108443,9782262097004,9782737390135]
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