Notre magazine

Dans Le Magazine de Dialogues, retrouvez les épisodes de notre podcast Les Éclaireurs de Dialogues, les vidéos des rencontres filmées des auteurs et autrices invités au café de la librairie, des interviews d’écrivains, d’écrivaines et d’artistes, des actualités, des sélections fouillées sur des thèmes d’actualité, les coups de cœur de vos libraires et conseillers et d’autres surprises qui font vivre la culture sens dessus dessous !

Podcast, Les Éclaireurs de Dialogues

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Podcast, Les Éclaireurs de Dialogues
Que lire avec Dialogues ? La rentrée littéraire 2024 2/2
Philippe Collin, en 2 épisodes
Que lire avec Dialogues ? La rentrée littéraire 2024 1/2

Les rencontres avec les auteurs et autrices, en vidéo

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Les rencontres avec les auteurs et autrices, en vidéo
Conseils de libraires - rentrée littéraire 2024
Les rencontres avec les auteurs et autrices, en vidéo | Mercredi 09 octobre 2024

Conseils de libraires - rentrée littéraire 2024

Laure, Rozenn et Julien, libraires à Dialogues, présentent leurs coups de cœur parmi les 459 nouveautés de la rentrée littéraire 2024. Voici les romans présentés au cours de cette rencontre : Conque, de Perrine Tripier (éd. Gallimard)  Badjens, de Delphine Minoui (éd. Seuil) Aux ventres des femmes, d'Huriya (éd. Rue de l'échiquier)  Dire Babylone, de Safiya Sinclair (éd. Buchet-Chastel) Madelaine avant l'aube, de Sandrine Collette (éd. JC Lattès)  Le Club des enfants perdus, de Rebecca Lighieri (éd. P.O.L) Le Rêve du jaguar, de Miguel Bonnefoy (éd. Rivages) Le Jardin de Georges, de Guénaëlle Daujon (éd. Intervalles)  La Barque de Masao, d'Antoine Choplin (éd. Buchet-Chastel) L'Œil de la perdrix, de Christian Astolfi (éd. Le Bruit du monde)  Bien-être, de Nathan Hill (éd. Gallimard) La Poète aux mains noires, d'Ingrid Glowacki (éd. L'Arpenteur) La Féerie quotidienne, de Sylvie Patin (éd. Ateliers Henry Dougier) Échappées, de Manon Jouniaux (éd. Grasset) Le Bleu n'abîme pas, d'Anouk Schavelzon (éd. Seuil) Retour à Belfast, de Michael Magee (éd. Albin Michel)  Au soir d'Alexandrie, d'Alaa El Aswany (éd. Actes Sud) Les Stripteaseuses ont toujours besoin de conseils juridiques, de Iain Levison (éd. Liana Levi) Si peu, de Marco Lodoli (éd. P.O.L) Alors c'est bien, de Clémentine Mélois (éd. L'Arbalète) Frapper l'épopée, d'Alice Zeniter (éd. Flammarion) Peau-de-Sang, d'Audrée Wilhelmy (éd. Le Tripode) Jacaranda, de Gaël Faye (éd. Grasset) Houris, de Kamel Daoud (éd. Gallimard) Les Âmes féroces, de Marie Vingtras (éd. de l'Olivier) Souviens-toi des abeilles, de Zineb Mekouar (éd. Gallimard)   [ean13_conseils|9782073056863, 9782021541724, 9782374254500, 9782283038253, 9782709674539, 9782818061435, 9782743664060, 9782369563501, 9782283038666, 9782386010149, 9782072999901, 9782073082664, 9791031206202, 9782246835745, 9782021562699, 9782226474698, 9782330194208, 9791034909537, 9782818061589, 9782073075031, 9782080440587, 9782370554239, 9782246831457, 9782072999994, 9782823621020, 9782073070296 ]  

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Rencontre avec Bernard Minier
Rencontre avec Tatiana de Rosnay
Les rencontres avec les auteurs et autrices, en vidéo | Mercredi 17 juillet 2024

Rencontre avec Tatiana de Rosnay

"Jamais la puissance de l'écriture ne m'avait amenée aussi loin dans le plaisir d'écrire", souligne Tatiana de Rosnay lors de cette rencontre autour de son nouveau roman, Poussière blonde (éd. Albin Michel). La romancière franco-anglaise a publié son premier roman, L'Appartement témoin, en 1992. En 2007, son neuvième livre, Elle s’appelait Sarah, rencontre un succès phénoménal : vendu à plusieurs millions d’exemplaires dans le monde, et adapté au cinéma en 2010 avec Kristin Scott-Thomas dans un des rôles titres. Depuis, elle a publié des romans et des nouvelles, au sein desquels on retrouve souvent plusieurs constantes : un intérêt pour les secrets de famille, une obsession pour la mémoire des murs, un goût des fins ouvertes et un attrait pour la noirceur de certains scénarios.   🎥 Au cours de cette rencontre, Tatiana de Rosnay nous invite à plonger dans la fabrique de son nouveau roman, Poussière blonde. À travers une narration prenante et qui traverse plusieurs temporalités, elle nous y projette dans les grands espaces du Nevada, aux États-Unis, des années 50 à 2000. Et l’on y suit Pauline, jeune française qui a rejoint les États-Unis avec sa mère alors qu’elle avait sept ans, et qui, lorsqu’elle a une vingtaine d’année et vit une vie plutôt étriquée, va la voir changée lorsqu’elle croise la trajectoire d’une immense star : Marylin Monroe, alors en plein tournage d'un film maudit : "Les Désaxés". [ean13_conseils|9782226489593]

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La vie de la librairie Dialogues

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EXPO ⎜ Renan Coquin
EXPO | Marie Le Guen
Un prix littéraire... pour les enfants !

Nos grands entretiens

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Nos grands entretiens
Nancy Huston et Francia, Lignes de failles de notre société
Nos grands entretiens | Vendredi 07 juin 2024

Nancy Huston et Francia, Lignes de failles de notre société

Électron libre de la scène littéraire, l’écrivaine franco-canadienne Nancy Huston est l’autrice de romans, essais, pièces de théâtre et d’un recueil de poèmes. Depuis son premier roman, Les Variations Goldberg, elle est traversée par les voix de nombreux personnages qui forgent et interrogent notre regard sur la société. Son nouveau roman, Francia, s’inscrit dans cette lignée, en nous plongeant dans le quotidien d’une travailleuse du sexe transsexuelle au bois de Boulogne.   Entretien mené par Laurence.     D’où est venu ce roman ?   C’est une première dans mon histoire littéraire : ce roman est presque né d’une commande. Un ami, ancien médiathécaire, m’a dit : « Je participe depuis des années aux maraudes dans le bois de Boulogne, et c’est vraiment un univers très impressionnant. Là, il y a un roman à faire et c’est toi qui dois le faire. » Je crois qu’il devait savoir que je travaillais sur Grisélidis* à ce moment-là. Au début, j’ai dit non. Et en même temps, ça m’interrogeait que je ne me sente pas concernée par les trans. J’ai donc rappelé quelques mois plus tard, et j’ai dit : « Oui, je vais venir. J’aimerais bien au moins voir la forêt la nuit, avec vous. » C’était avec une association sous l’égide de l’Église catholique, Magdalena, comme dans le roman. Et cette nuit-là, on était au mois de novembre et il faisait très froid. Même à l’intérieur du camion, on avait nos manteaux. Alors de voir ces femmes quasi-nues à l’extérieur, c’était déjà impressionnant. Plusieurs sont montées dans la camionnette discuter avec nous, et j’ai découvert leur niaque, leur sens de l’humour, leur gentillesse, leur solidarité. L’ambiance est finalement beaucoup plus positive que dans les rues de Paris un jour lambda. Je les ai trouvées étonnantes et ça ne s’est jamais démenti. J’ai fait pas mal de maraudes par la suite, et le personnage de Francia a commencé à se cristalliser. J’ai interviewé plusieurs personnes, et j’ai décidé qu’elle devait être colombienne pour des raisons autres, qui ont à voir avec des amis à moi, colombiens, que j’avais envie d’interroger aussi. Donc je suis allée là-bas pour essayer d’imaginer son enfance, comme petit garçon dans la ville de Girardot, j’ai appris un peu l’espagnol, j’ai engagé une jeune prof colombienne pour apprendre avec l’accent. Voilà. Et j’ai avancé un petit peu à tâtons, mais j’avais décidé dès le début qu’il fallait 17 clients. Ça, c’était une décision de mon « dictateur ». Heureusement que j’ai un dictateur, une voix interne, qui donne au départ de chaque roman quelques instructions très précises. Et le titre Francia s’est imposé tout de suite, parce que je voulais aussi qu’à travers les 17 clients de ce jour-là, nous ayons une sorte de mosaïque de la France contemporaine.   Ce titre, Francia, c’est aussi le nom du personnage principal. Comment s’est-elle dessinée sous votre plume ?   C’est un processus mystérieux, heureusement. Je ne peux pas expliquer exactement comment cela se passe. Nous faisons tous un peu la même chose la nuit, dans nos rêves, nous inventons des personnages, il y a des créatures qui surgissent comme ça. L’idée de la claudication du personnage est venue très tôt, c’était une décision absolument sûre dès le début. Mais par exemple, je ne savais pas ce qui avait causé ce boitillement, je l’ai appris plus tard. Et c’est comme ça, l’écriture de romans. Ça peut paraître étrange pour les gens qui n’y sont pas, mais nous pouvons tout à fait nous poser une question à propos d’un personnage, un être humain qui n’existe pas, et recevoir la réponse juste. Parfois il faut attendre longtemps.   Ce roman est né des maraudes que vous avez faites, de rencontres… Comment avez-vous alors abordé la question de la justesse ? Est-ce qu’il s’agissait d’intégrer vos témoins dans le processus de l’écriture ?   Non, je ne pouvais pas tellement faire lire au fur et à mesure. Maintenant, il y en a qui le lisent, qui l’ont lu, et qui - heureusement pour moi, je suis très soulagée - l’aiment bien. Mais c’est quelque chose de… c’est le métier. Je suis vraiment une romancière professionnelle et donc je fais confiance à cette logique. Et je sais quand je me trompe. C’est étonnant ! Par exemple, dans la première version, la première scène où j’apparais, dans la camionnette sous le nom de « La Griffonne » - parce que je suis présente dans le livre de temps en temps, je surgis au milieu des personnages -, il y a une des femmes qui est très méfiante et très cassante. Dans la première version, c’était Francia. Et puis, au bout de quelques mois, j’ai compris qu’elle était incapable de parler comme ça. Parce que j’avais construit le personnage de la grand-mère entretemps, parce que je savais que cette grand-mère lui avait appris les valeurs essentielles de la vie : la douceur, l’écoute, et une certaine relation à Dieu. Une relation très heureuse, j’ai envie de dire, qui consiste à pouvoir poser ses soucis, à demander à Dieu que la famille aille bien, que les gens se pardonnent, etc. C’est très doux comme christianisme. Ce n’est pas du tout quelque chose de sévère et de raide comme peut l’être le catholicisme dans d’autres contextes. Donc c’est curieux comme livre parce qu’il y a par exemple des clients qui ont des diatribes anticatholiques d’un côté, et puis ce personnage principal, central, qui elle-même est profondément pieuse, croyante, pratiquante. Et quelque part, je me sens plus proche intellectuellement de ceux qui attaquent l’Église, mais mon cœur va complètement avec Francia. Et je n’ai aucune difficulté, étrangement, à construire quelqu’un qui est croyante de cette façon-là. Et pas seulement à la construire mais à l’aimer.     Dans le roman, il y a aussi 17 autres voix d’hommes que vous faites exister au plus près de leurs fêlures, et qui sont une ébauche de notre société, des non-dits qui la traversent et la tiennent. Que s’agissait-il de dire, grâce à ces voix ?   Je trouvais qu’il fallait restituer l’autre moitié du tableau, tout simplement, dont on ne parle jamais. Quand j’interrogeais les femmes pour savoir qui étaient les clients, elles avaient toutes la même réponse exactement : « C’est tout le monde. » Et puis, grâce à Grisélidis aussi, j’ai réfléchi de plus en plus pour me demander : « Mais, pourquoi est-ce qu’on méprise les prostituées ? Qu’est-ce qui est honteux, au juste ? Qui est lésé dans cette affaire ? » Et j’ai compris que la haine de la prostituée, c’est la haine de la sexualité féminine tout simplement. Or, dans la prostitution, il n’est jamais question de sexualité féminine. C’est ça qu’on met en scène dans des films, dans la pornographie, bien sûr, dans des tableaux, dans toutes les représentations, c’est cette féminité soi-disant exhibitionniste, obscène, avec les mimiques, les attitudes... Et tout ça, ce sont les fantasmes des hommes. En réalité, il est question de sexualité masculine, et c’est de ça qu’on ne parle jamais quand on parle de prostitution. C’est la demande qui crée la prostitution, ce n’est pas l’offre. L’offre correspond à un besoin d’argent simplement.   Tous ces hommes qui traversent le roman, on découvre leurs pensées dans des moments de vérité, dans la mesure où ils sont hors de vue de la société. Comment est-ce qu’en tant que romancière, on investit cet espace de liberté, en dehors de toute question de bienséance ? Est-ce qu’il s’agissait de se tenir au plus près des personnages, et de ne surtout pas les juger ?   Oui, je n’invente pas un personnage pour le ridiculiser, pour le tourner en bourrique. Je n’aime pas les charges, les caricatures. J’aime bien quand c’est drôle, donc c’est souvent assez comique, par certains côtés, chacun à sa manière, mais c’est parce que les pensées qui leur traversent l’esprit peuvent être cocasses. C’est comme dans Les Variations Goldberg, c’est ce que j’ai appris à faire. Comme je le dis, moi c’est plutôt « pute de cerveau » : depuis toujours, je me laisse pénétrer par des inconnus. Sans doute parce que, petite, j’étais toujours la nouvelle, à l’école. Je devais toujours me mettre à la place des autres pour voir comment ils me voyaient, qu’est-ce que je devais faire, quelles étaient les valeurs en vogue ici, etc. Et donc je n’ai pas UNE langue française, par exemple, à moi. J’imite celle des autres, je ne parle pas des accents mais des façons d’utiliser la langue. J’écoute. L’ouïe est mon sens le plus aigu.   Francia raconte aussi le quotidien des travailleuses du sexe au bois de Boulogne, et c’est un monde où il y a beaucoup de violence. Était-ce difficile à traiter dans le roman, cette question de la violence ?   Au moment où j’ai vraiment commencé à écrire le livre, il y a eu le procès des tueurs de Vanesa Campos, et j’ai assisté à ce procès. C’était en deux fois, d’abord au Palais de Justice dans l’île de la Cité, et ensuite en appel au tribunal d’instance de Créteil. Deux semaines la première fois, trois semaines la deuxième. Et j’ai été très frappée par le contraste entre ces bâtiments, surtout l’ancien Palais de Justice au centre de Paris, qui est le symbole même de tout ce que valorise la République, avec ses statues de la Renaissance, les fresques sur les murs, l’architecture imposante, les juges avec l’hermine, et nous étions là à évoquer un univers de sperme, de sang, de boue, de flingues, de vol, de viol, d’étranglement, etc. Vanesa Campos était une travailleuse du sexe transgenre péruvienne, qui a été tuée avec l’arme de service d’un policier. Quinze jours avant le crime, il avait laissée cette arme dans sa voiture pour être lui-même client. Il y avait une telle densité d’extrêmes réunis dans la même pièce, et je me suis dit, les gens ne veulent pas regarder ces marges et les comprendre, et comprendre à quel point le fonctionnement de notre société, de notre civilisation, dépend aussi de ces travailleurs et travailleuses du sexe. Et la France est très en retard dans ce domaine, comme elle a été un des derniers pays à accorder le droit de vote aux femmes, c’est un des derniers pays à comprendre l’importance de respecter les travailleurs et travailleuses du sexe. Il y a des pays beaucoup plus avancés sur ce thème. La France en est encore à pénaliser les clients alors que toutes les études montrent que dans les pays où les clients sont pénalisés, le taux de viol augmente systématiquement.   Peut-on dire que Francia est un roman politique, dans le sens où il change notre regard sur le monde ?   Je l’espère, oui. Quelqu’un a dit récemment : « C’est un livre-monde ». Eh bien, c’est un peu l’ambition, oui, c’est sûr.   Et « La Griffonne », fallait-il des années d’expérience d’écriture pour la laisser entrer ?   Sans doute. Oui. J’ai essayé de le faire avec L’Empreinte de l’ange il y a 25 ans, j’avais une version où je racontais aussi mon histoire, je glissais ça et là des comparaisons entre moi et le personnage principal. Mais mes éditeurs ont dit: « Non, ça distrait. L’autre histoire est tellement intense, il ne faut pas qu’il y ait ces distractions. » Et ici, je me suis dit : « Je me lance, c’est trop tentant. » J’ai fait plusieurs scènes comme ça, puis je les ai supprimées. Mes éditeurs ont tous réclamé davantage, donc je les ai ressuscitées. Et voilà. C’est vrai qu’on a besoin de rigoler de temps en temps, parce que c’est un monde dur. Très dur. J’étais en train de lire, à l’instant, une citation d’Ernest Renan : « Une philosophie perverse sans doute me portait à croire que le bien et le mal, la joie et la douleur, le beau et le laid, la raison et la folie, se transforment les uns dans les autres par des nuances aussi indiscernables que celles du cou de la colombe. » C’est beau, ça. Rousseau disait la même chose : « Bien et mal coulent de même source. » Et Romain Gary aussi, c’est vraiment une chose qui le hantait, qu’il appelait le couple infernal. Le meilleur et le pire sont inséparables. Et effectivement, je pense que si on a un monde où tout le monde est gentil et sympathique et généreux et adorable, il n’y aura plus besoin de littérature.   Pour découvrir la bibliothèque idéale de Nancy Huston, cliquez ici !   [ean13_conseils|9782330188764]

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Camille Blandin, "Rigoler, ça fait du bien !"
Nos grands entretiens | Lundi 03 juin 2024

Camille Blandin, "Rigoler, ça fait du bien !"

Sport oblige (ou pas !), on a souhaité aller à la rencontre de Camille Blandin qui sort une BD drôlissime, On est en finale, aux éditions Misma. L’histoire d’une équipe de basket rurale qui arrive en finale départementale sur une série de malentendus ! Jeune illustrateur et auteur de trois bandes dessinées – Rien à feutre, Papa ou le Francky et On est en finale –, à la tête d’une communauté de plus de 60 000 personnes sur Instagram, Camille Blandin répond à nos questions !   Pourriez-vous nous raconter à quel moment la bande dessinée est entrée dans votre vie ?   J’ai toujours dessiné, et je voulais déjà être auteur de BD quand j’étais au collège. En entrant aux Beaux-Arts de Toulouse, j’ai découvert énormément de pratiques et de techniques qui m’ont éloigné, un temps, de la bande dessinée. J’y suis revenu assez naturellement en fin de cursus, avec d’abord mon mémoire de fin d’études de graphisme sur la question sonore en BD, puis le lancement de mon compte Instagram.   Rien à feutre met en scène des strips sur une page, Papa ou le Francky développe des saynètes sur plusieurs pages, On est en finale est une histoire au long cours. Comment est né ce dernier projet ?   En réalité, ce livre est une réécriture d’une BD que j’avais justement faite en fin d’études. Elle faisait environ 120 pages, et était beaucoup plus sommaire que la version publiée. Je l’avais quand même imprimée (en deux exemplaires, budget étudiant oblige), juste pour le plaisir d’avoir l’objet. J’ai eu envie de reprendre ce projet, en l’étoffant d’un point de vue narratif et visuel, avec l’ajout d’un public, de plusieurs personnages secondaires, une vraie unité de lieu…   Le grand public vous a découvert sur votre compte Instagram, @Strrripclub. Que représente ce compte Insta pour vous ?   C’est assez évident pour moi que c’est ce qui m’a permis de me lancer dans la BD, d’avoir une première visibilité dans ce milieu. Je vois Instagram comme un outil de diffusion, mais j’essaie de ne pas aller au-delà. Jouer le jeu des algorithmes me prend trop la tête, je n’ouvre jamais la section « statistiques » du compte, parce que si je vois une baisse, j’ai l’impression que ça y est, tout est fini, les gens m’ont oublié, je prépare ma reconversion. D’ailleurs là, j’ai commencé un CAP aéronautique parce que mon dernier post a pas trop marché. J’ai peur de l’avion en plus…   Dans On est en finale, on rit beaucoup ! L’humour, quelle signification, et quel pouvoir il a ici, pour vous ?   Rigoler, ça fait du bien. Mon objectif n°1 est de faire rire les gens. Même si en lisant mes livres, on a une idée assez claire de mes opinions politiques, sociales, écologiques, ce ne sont pas des sujets que je développe énormément. Ça m’a souvent questionné. Mais je crois qu’essayer de faire rire les gens, même sur des sujets très simples ou absurdes, c’est une forme d’engagement.   À un moment de l’album, vous tentez un nouveau style de dessin, et on vous voit même apparaître : vous rompez la convention (et vous râlez aussi !). La bande dessinée est-elle un territoire de jeu idéal ?   De mon point de vue, c’est en effet un super outil pour créer du lien. Justement parce que je me nourris du quotidien dans mon travail, du vécu de tout le monde, de scènes banales. Papa ou le Francky a forcément fait écho à d’autres papas. Et puis j’aime parler de là où j’ai grandi, c’était important pour moi d’inscrire On est en finale dans un milieu très rural, et je crois que ça permet aussi à des personnes de s’identifier à ça. Mes personnages et mes lieux ne sont pas fantasmés, tout est assez ancré dans le réel (enfin sauf quand je dessine des loups-garous et des vampires mais bref).   Votre regard est très tendre, malgré l’humour - peut-être même grâce à l’humour. Peut-on vivre sans tendresse ?   « On peut vivre sans la gloire, qui ne prouve rien. Être inconnu dans l’Histoire et s’en trouver bien. Mais vivre sans tendresse, il n’en est pas question… » Bourvil. Je mets des citations, ça fait intelligent, en plus c’est la chanson préférée de mon papy. Bien sûr qu’on ne peut pas vivre sans tendresse ! La preuve : dans On est en finale, ce n’était même pas une volonté de ma part. Ça vient naturellement. [ean13_conseils|9782494740044,9782492926266,9782377541461]

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Annick Cojean, le D-Day heure par heure par ceux et celles qui l'ont vécu...
Nos grands entretiens | Lundi 03 juin 2024

Annick Cojean, le D-Day heure par heure par ceux et celles qui l'ont vécu...

Le 6 juin 2024 marque les 80 ans du Débarquement. Plus grande opération militaire de l’Histoire, c’est aussi une aventure profondément humaine. C’est dans cette dimension que nous plonge le nouveau livre d’Annick Cojean, Nous y étions, grâce aux voix de 18 témoins qui nous racontent ce jour, le plus long et le plus important de leur vie.     Dans Nous y étions, vous nous faites revivre heure par heure le D-Day, grâce aux voix de 18 hommes et femmes qui l’ont vécu. En quoi est-il essentiel, aujourd’hui, de continuer de faire vivre cette mémoire ?   Le 6 juin 1944 a été un tournant majeur de la Seconde Guerre mondiale. L’enjeu était colossal et a exigé des sacrifices terribles... au nom du combat contre le fascisme et pour la liberté. Il est donc juste qu’on reconnaisse le courage insensé dont ont fait preuve les hommes qui y ont contribué. Comme il me semble vital que l’on se souvienne que la liberté n’est pas un bien inné, acquis, naturel, évident. Qu’il a fallu la conquérir, se battre pour la défendre et la conserver. Son prix a été exorbitant. Elle est précieuse, mais si fragile. Il importe donc, toujours, d’être vigilant.   C’est un livre qui vient de loin d’une série d’articles parue dans Le Monde en 1994, d’une longue enquête qui les a précédés, de souvenirs d’enfance aussi et des récits de votre maman. Pourriez-vous nous raconter le chemin qui vous y a mené ?   Ma mère, petite fille, habitait Caen au moment du Débarquement. Sa maison a été bombardée, sa famille, comme des milliers d’autres, a dû prendre le chemin de l’exode. Elle a vécu alors mille événements qui sont entrés dans la légende familiale car c’était une merveilleuse conteuse. J’ai donc toujours vécu avec « l’épopée » du Débarquement. Quand s’est approché son 50e anniversaire, j’ai souhaité retrouver les combattants - Américains, Anglais, Canadiens... et même Allemands - qu’elle aurait pu croiser. Je voulais les rencontrer, et les entendre me raconter l’histoire avec leurs mots, leurs images, leurs émotions. Je voulais ressentir le souffle du D-Day et revivre cette histoire d’aussi près que possible. Être avec eux sur les plages, dans un planeur, un hélico... voire même dans un blockhaus.   Les 18 témoins dont vous retranscrivez les voix ne sont pas tous du même camp, ont eu des rôles, et des vécus différents. Mais ce qui les relie tous, c’est que ce jour les a marqués à tout jamais. De quelle manière, avec quelles émotions, vous ont-ils alors livré leurs récits ?   Ils replongeaient dans le temps avec une facilité inouïe. Ils avaient à nouveau 18, 20, 22 ans. Une maman à qui ils pensaient, plus souvent qu’à une fiancée. Une foi chancelante mais que réveillaient les premiers coups de canon. L’envie d’en découdre et de servir leur pays. Mais ils avaient peur aussi. Terriblement peur devant le feu et la mitraille; la mort qui pouvait les cueillir à tout moment et à laquelle, pour la plupart, ils n’avaient jamais été confrontés. Leur propre mort devenait envisageable, ils s’y résignaient presque. Celle de leurs camarades en revanche était insupportable. Les scènes d’apocalypse vécues sur les plages, aux premières heures du D-Day, demeuraient à jamais gravées dans leur rétine.   Parmi les témoins, plusieurs évoquent l’incommunicabilité de ce que l’on vit à la guerre, les liens inébranlables et la complicité éternelle entre les frères d’armes, mais aussi le fait que les larmes n’étaient pas présentes au front, mais sont venues des années plus tard. Comment avez-vous alors procédé pour faire remonter ces souvenirs en douceur, et fallait-il pour cela de longs temps d’interview, de nombreux entretiens ?   On ne pleurait pas sur le champ de bataille et malgré les souffrances. Mais au cours des interviews, les larmes affluaient souvent. «C’est incroyable comme elles viennent facilement!» s’excusait un vieux soldat. « C’est comme si on avait gardé toute cette eau pour plus tard... » Les souvenirs abondaient, je n’avais guère de mal à faire parler mes vétérans. Très pudiques au départ, si inquiets de lasser, ils se prenaient au jeu et me sortaient de vieilles photos, des cartes, des médailles, un morceau de parachute ou un foulard de soie représentant la carte de France pour qu’ils ne s’égarent pas... Des trésors que certains n’avaient encore jamais vraiment montrés. Ils étaient heureux de parler. Oui, heureux d’être considérés et écoutés.   Dans tous ces témoignages, on découvre du courage, une volonté de bien faire, un respect de la hiérarchie, de la camaraderie, une certaine foi aussi, et partout, un sentiment: celui d’une guerre « juste ». En quoi était-elle fondamentale, cette notion de guerre juste ?   C’est vrai, du côté des alliés la conviction de mener une guerre juste était unanimement partagée. Ils n’avaient pas de doute et faisaient confiance à leurs gouvernements qui présentaient l’opération comme une lutte morale opposant le bien et le mal. Ils se pensaient du bon côté de l’Histoire. Eisenhower, en s’adressant à eux, la veille du D-Day, avait parlé de « grande croisade » et lancé : « Les espoirs, les prières des peuples épris de liberté vous accompagnent. » Cela les galvanisait. La situation était toute autre côté allemand, du moins chez les très jeunes soldats qui, pour la plupart, avaient été enrôlés de force dans la Wehrmacht et n’adhéraient pas au nazisme.   Au fil de la lecture de ces témoignages, on prend aussi la mesure de l’opération exceptionnelle et d’immense envergure qu’a été le D-Day. On réalise que rien n’était gagné d’avance, que toute l’opération avait été prévue à la minute près, et que définir sa date était loin d’être évident. Comment cette date du 6 juin s’est-elle alors imposée ?   Le D-Day est une opération d’une précision mécanique époustouflante. Elle a été précédée de mois, voire d’années d’entraînement, et on ignore souvent que davantage de vies ont été perdues dans la préparation du D-Day que lors de la journée elle-même. Quant au choix de la date, ce fut l’objet d’un véritable casse-tête. La marine exigeait un débarquement à marée basse, car il fallait pouvoir distinguer sur les plages les nombreux obstacles diaboliques disposés par le maréchal Rommel. Elle souhaitait aussi un assaut à l’aube, afin de pouvoir approcher des côtes françaises sous le couvert de la nuit. Les généraux parachutistes, eux, demandaient la pleine lune pour que les hommes puissent repérer le sol. Le créneau était donc très étroit. Sans compter la nécessité du beau temps, tout au moins l’absence de tempête qui ficherait la pagaille... Or voilà qu’elle s’est levée dans les premiers jours de juin, potentiellement dévastatrice, forçant Einsenhower à différer d’un jour le Débarquement initialement fixé au 5 juin.   Dans ce livre, on plonge dans l’histoire en marche en ce 6 juin, et on découvre aussi de nombreuses anecdotes. On apprend par exemple que des archers accompa- gnaient les missions commando de repérage en amont du D-Day ; on se rappelle aussi qu’un joueur de cornemuse était présent et jouait sur le champ de bataille... Quelle est celle qui vous a le plus marquée ?   Il y a tant d’histoires qui m’ont subjuguée ! Bill Millin, la cornemuse de Lord Lowat, qui tient à débarquer en kilt sur la plage, digne et impérial malgré la mitraille, soucieux de jouer les grands airs de circonstance. Le ranger magnifique de la Pointe du Hoc qui supplie de ne pas croire les affirmations de Cornélius Ryan, l’auteur du Jour le plus long, selon lequel la mission avait quasiment échoué puisque les canons allemands qui justifiaient cette mission-suicide n’existaient pas... alors que c’est lui-même les a démantelés. Et puis Charles Lynch, le plus jeune correspondant de guerre du D-Day qui débarque avec sa machine à écrire et une quinzaine de pigeons voyageurs !   Dans cette histoire, il y a aussi des traumatismes qui ne passent pas. Ainsi, l’un des témoins a mis des décennies à se remettre de son stress post-traumatique. Un autre parle de l’opération Tiger, qui a mal tourné, quelques semaines avant le débarquement. Des témoins polonais et allemand, pour des raisons différentes, disent aussi la difficulté à accepter la façon dont l’Histoire a été racontée après. En quoi était-il important de faire entendre aussi ces voix-là ?   Toutes les voix m’intéressaient ! Tous les points de vue, toutes les perspectives, toutes les subjectivités. La guerre est racontée ici sous l’angle personnel et terriblement humain. Et chacun livre son expérience sans le filtre des généraux ou la censure militaire qui a obligé à passer sous silence des épisodes peu glorieux voire infiniment douloureux.   Tous les récits des témoins sont écrits à la première personne, et de véritables voix transparaissent, au plus près desquelles on se tient. De quelle manière vous suivent-elles et vous accompagnent-elles, ces voix, après l’écriture de ce livre ? Et quel lien, quels souvenirs gardez-vous de ces témoins, de ces rencontres ?   J’avais longtemps gardé un lien avec quelques-uns de ces vétérans. L’un m’écrivait régulièrement, l’autre m’invitait à déjeuner lorsqu’il passait à Paris. Hélas, la précieuse armoire dans laquelle je gardais au Monde tous mes petits carnets a disparu, lors d’un déménagement de mon journal. Et j’ai perdu mon trésor. Il me reste quelques photos, glissées dans mon album de famille: l’une prise à New York avec un ranger américain, une autre à Montparnasse avec mon joueur de cornemuse qui avait revêtu son kilt pour être sûr que je le reconnaisse, une autre en Normandie, entourée de Canadiens, le 6 juin 1994... Ces souvenirs me sont chers et restent indissociables de mon lien très fort avec ma mère, ma conteuse merveilleuse du Débarquement.   [ean13_conseils|9782246838746,9782364452626,9782737388880,9782021542158,9782824622156,9791040405320,9782253108443,9782253108443,9782262097004,9782737390135]  

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