o n l a l u
La fiction comme la vie

C’est un très étrange, intense et émouvant nouveau livre que signe aujourd’hui Agnès Desarthe. La romancière prolifique, qui avait eu le Prix du livre Inter dès son deuxième roman, « Un secret sans importance » en 1996, a depuis poursuivi une œuvre personnelle faite de textes qui tiennent sur un fil et dont on n’oublie pas les personnages, ainsi le narrateur d’ « Une partie de chasse », son dernier livre sorti chez L’Olivier en 2012. Elle est également auteur de littérature jeunesse et traductrice, notamment de Virginia Woolf et Cynthia Ozick. Avec « Comment j’ai appris à lire », Agnès Desarthe réfléchit à sa relation à la lecture, ou plus exactement à la littérature, relation qui, nous dit-elle de façon extrêmement surprenante, avait mal commencé. Quand d’aucuns se vantent d’avoir lu tout Proust à douze ans, Agnès Desarthe confie avoir longtemps prétendu ne pas aimer lire, et opposé une résistance opiniâtre aux textes imposés par l’institution scolaire, alors même qu’elle a été une excellente élève depuis la petite école jusqu’à Normale sup. Mais elle nous prévient en guise de prologue : « Apprendre à lire a été pour moi une des choses les plus faciles et les plus difficiles. Cela s’est passé très vite, en quelques semaines ; mais aussi très lentement, sur plusieurs décennies.

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Mirontaine sta leggendo

Je ne connais l'auteur qu'en littérature jeunesse mais le titre de cette dernière parution m'intriguait beaucoup. Pour celle qui publie de très beaux textes pour la jeunesse, je suis très surprise d'apprendre que pendant très longtemps, lire l'ennuyait profondément.

"Je n'ai aucun problème avec la lecture. J'ai un problème avec les livres."

Mirontaine sta leggendo

Je ne connais l'auteur qu'en littérature jeunesse mais le titre de cette dernière parution m'intriguait beaucoup. Pour celle qui publie de très beaux textes pour la jeunesse, je suis très surprise d'apprendre que pendant très longtemps, lire l'ennuyait profondément.

"Je n'ai aucun problème avec la lecture. J'ai un problème avec les livres."

Petite, Agnès Desarthe déclarait à qui voulait l'entendre que lire ne servait à rien. Son souhait, dès sa prime enfance, est d'écrire. Seulement, il est difficilement concevable d'écrire sans maîtriser la faculté de lire. Pour une élève appliquée, cette position semble plutôt saugrenue et surprenante. C'est ce cheminement sur la question de la lecture et de l'écriture que nous confie ce récit.

"Lire, c'est mourir un peu".

Elle tente d'expliquer aux lecteurs les raisons pour lesquelles la lecture lui paraît ennuyeuse. En fait, sa préférence repose sur le fait de raconter elle-même des histoires. L'anecdote de sa première tentative d'écrit avec un pseudo plagiat d'une oeuvre de Druon, cette aptitude très tôt à vénérer l'objet livre mais aussi ce rapport malicieux avec les livres viennent truffer le cheminement de notre apprentie lectrice de manière très sincère. Elle a aussi l'humour pour allié. Toute petite, Agnès Desarthe fait preuve d'une imagination très riche. Elle évolue dans un milieu bourgeois et ce désinterêt pour la lecture fut indubitablement une faille dans l'éducation de cette jeune fille brillante qui s'orientera ensuite dans des études de lettres supérieures.

"A chaque livre, j'espère. A chaque livre, je suis déçue. Je veux que ça sonne, je veux que ça ne ressemble à rien, je veux qu'on m'en mette plein la vue".

Agnès Desarthe raconte les sources de cette mésentente avec la lecture. Comment est-elle parvenue à aimer les livres? Elle est prête à "avaler des kilomètres de phrases, pourvu qu'un décalage avec le quotidien s'exhibe". Elle développe longuement sur les livres qui ont su éveiller sa curiosité notamment Tistou les pouces verts de Maurice Druon, puis ensuite les poèmes de Prévert, les textes de Faulkner, Duras, Camus... Dans une dernière partie, elle évoque brillamment le lien entre l'écriture et la traduction. Cette démonstration est riche de sens.

Très jolie confession qui est venue compléter dans ma bibliothèque le petit fascicule de l'Ecole des loisirs. Le parcours de cette enfant sage qui tourne le dos à la lecture est passionnant et servi par une stylistique très étoffée.

Comment j'ai appris à lire d'Agnès Desarthe, Stock, mai 2013.