Yv

Un roman qui débute bien, très bien même. Le premier chapitre est puissant et prometteur : "Accroupie et grelottante, je pisse dans la litière de mon chat. Là où il y a le plus de gravillons pour faire le moins de bruit possible, terrorisée à l'idée que mes parents pourraient se réveiller, entrer dans ma chambre et tomber sur ce spectacle navrant. "Elle est vraiment folle !", cette fois, ils en seraient convaincus." (p.7) La suite oscille entre des chapitres tout aussi forts que ce premier et d'autres moins bons, longs même et certains dont on se demande comment ils ont atterri dans ce bouquin, ce qui donne parfois à l'ensemble une construction artificielle et lui ôte une partie de sa profondeur. Plus quelques références de presse féminine que je n'ai pas, ce qui n'est que gênant parfois mais pas rédhibitoire. Voilà pour mes impressions. Pour résumer c'est un roman qui aurait pu être excellent, fort, puissant et qui est bon voire très bon dans certains passages mais qui ne passe pas la barre du livre pour lequel je m'enflamme et m'enthousiasme.

Florence est un beau personnage, cinquante-deux ans, pas de mari, pas d'enfants, tout cela à cause de son histoire personnelle. Très indépendante, elle se questionne sur sa solitude, multiplie les aventures, a une liaison depuis trois ans avec un homme marié, un écrivain, attire plutôt les hommes plus jeunes qu'elle. On sent qu'après trente ans de brouille familiale, elle aimerait renouer avec les siens : sa mère venant de mourir il lui reste son père et ses deux sœurs nettement plus âgées qu'elle. Il est temps pour elle d'éclaircir les zones sombres de sa famille pour vivre. Elle se heurte bien sûr aux silences et incompréhensions des autres.

Beaucoup de belles pages sur le passage de la cinquantaine, sur l'amour à cet âge, le désir, la séduction. Je trouve intéressant que ce soient des hommes jeunes (trentenaires) qui draguent Florence, dans les romans et les films, ce sont souvent les hommes aux tempes grises qui ont des femmes ou des amantes de trente ans... La relation père-fille telle que la traite Roselyne Madelénat me plaît moins, disons qu'elle ne me paraît pas crédible, je n'y crois pas une seconde, pas assez construite, trop soudaine... Cette soudaineté est peut-être envisageable, mais pour mon caractère un rien solitaire et peu enclin aux retrouvailles et rapprochements aussi rapides, elle est difficile à envisager. Certaines longueurs auraient pu être évitées à certains endroits pour permettre d'étayer un peu ces retrouvailles... Et ce secret de famille qui tarde à se révéler, on sent bien qu'il tourne autour des années de guerre, mais c'est confus et que de tours et détours pour y arriver.

Maladroit parfois, mais toujours sincère, c'est un roman qui gagne à être découvert, une écriture qui va au plus direct. Florence est touchante, agaçante, sympathique, chiante, obstinée et changeante, en plein désarroi, amoureuse, seule, ... tout cela à la fois. Pleine de contradictions, d'envie et de limites. Une femme qui à cinquante-deux ans veut profiter pleinement des nombreuses années qui lui reste. Tout ce qu'elle a vécu jusque là était étouffé par ses peurs, ses angoisses de petite fille. Enfin, elle peut s'ouvrir et se livrer, pour elle,la vie commence à cinquante-deux ans...