Eireann Yvon
Il y a de la violence dans l’Eire !

Colin Barrett est un nouveau venu dans les lettres irlandaises. Je le découvre par ce recueil de sept nouvelles. Ce livre a obtenu le « Frank O'Connor Short Story Award » !
La vie dans la campagne irlandaise n’est plus ce qu’elle était !
« Le petit Clancy », deux amis, le narrateur, Jimmy, et Tug, un colosse, homme-enfant sous médicaments, boivent au pub du village. C’est le dimanche soir, Jimmy soigne sa gueule de bois, Tug, lui, obnubilé par l’affaire du petit Clancy, un enfant qui a disparu, sûrement kidnappé. Jimmy pense à Marlène avec qui il a fait l’amour et qui va se marier à un autre, père de son enfant…
« L’appât », un jeune homme et son cousin Matten qui entretient son chagrin d’amour ! Il a eu une aventure avec Sarah mais il ne s’en est pas remis. Couple formé suite à des délibérations entre les garçons et les filles de la bande sous fumette… Matten y a cru ; depuis il traîne sa déprime, il lui reste le billard. Mais il se passe des choses étranges le soir dans les bois !
« Dans sa peau ». Eamonn dit Bat, ce jeune est profondément marqué. Sa vie est devenue un enfer par la stupidité d’un taré, drogué et passablement éméché. Bat était au mauvais endroit au mauvais moment, et depuis il promène son visage ravagé malgré de nombreuses opérations. Un texte très fort sur la bêtise humaine !
« Le calme des chevaux », c’est l’histoire d’une vengeance tragique sur fond de viol, de trafic d’herbe et de problèmes familiaux. Un ancien boxeur, un de ses amis, des oncles paysans irlandais d’une autre époque, vieux garçons vivant dans une ferme délabrée. Mais ils ont laissé l’agriculture traditionnelle pour la culture de l’herbe et ont leurs propres dealers… Pas mal de morts au final !
« Diamants », un homme et une femme qui se rencontrent aux alcooliques anonymes, qui boivent ensemble, tentent de faire l’amour mais ne le peuvent pas. L’homme part quelques jours, boit et reboit encore, puis il rencontre une autre femme. Un texte d’une grande noirceur.
« Merci de m’oublier ». Deux hommes dans un bar doivent aller à l’enterrement d’une femme ; ils furent musiciens dans un orchestre courant après le succès. Ils furent les amants de cette femme, l’un après l’autre et aussi simultanément. L’un des deux l’épousa, le divorce vint vite. Puis le temps a passé inexorablement. Un beau texte plein de tristesse. La vie et ses aléas.
Des personnages pour la plupart tourmentés, des fous furieux comme Tansey le Nabe, des tontons flingueurs trafiquants de drogues, le videur d’une boîte de nuit et la fille de son employeur, des êtres violents, mais aussi des victimes. Mais tous ont des destins affligeants.
Colin Barrett perpétue la longue tradition des auteurs irlandais de nouvelles, des anciens comme James Joyce, Frank O’Connor ou Sean O’Faolain aux modernes comme Anne Devlin, Anne Enright ou Claire Keegan entre autres. La majorité des grands auteurs irlandais ont écrit des nouvelles, John McGahern, William Trevor, Edna O’Brien ou encore Colum McCann et Colm Toibin et je ne peux pas tous les citer.
Pour le reste, j’ai un avis mitigé sur ce recueil, c’est bien écrit, très sombre, noir parfois comme dans « Le calme des chevaux », (près de cent pages), nouvelle qui, pour moi, est la plus aboutie. J’ai trouvé que les textes s’amélioraient au fil des pages mais tous ont un parfum étrange que j’ai du mal à définir, souvent dérangeant. Un bon recueil malgré ces réserves.
À noter une très belle couverture !