L'ODYSSEE D'HOMER... J. SIMPSON

Où se trouve la ville de Karlotta-Pietra ? Ne cherchez pas ! Cette ville d’opérette au charme discret est sortie de l’imagination de Stéphane Heaume. Une ville fantasmée donc, sur laquelle souffle le vent de la dictature... Bientôt la ville sera déclarée close et ses habitants, pris au piège.
Il faut un héros, ce sera Sebastian Wimer, dont la femme Agathe a été assassinée. L’homme est inconsolé. Jusqu’au jour où lui apparaît une femme, le sosie d'Agathe... Comment est-ce possible ? Agathe dit se nommer Kathrin Petersen mais Sebastian le sait, c’est bien sa femme ! Une seconde chance leur est-elle permise ? Sebastian, aidé du jeune Léos, va mettre sur pied une évasion spectaculaire de la ville-prison au cours d’un défilé nautique. Mais c’est sans compter sur les fantômes du passé, la trahison des plus proches et le sens d’une histoire nationale meurtrie.

Alex-Mot-à-Mots
dystopie, suspens

Où se situe l’action ? Peu importe. On devine, au fil des pages, des noms des personnages et des rappels historiques que la Cité fortifiée se situe quelque part entre Venise, l’ex-Yougoslavie et l’Autriche.

Peu importe, au final. L’auteur sait créer une ville, ses monuments et ses quartiers, mais surtout son ambiance si particulière à la veille d’un événement politique de taille.

On suit Sebastian pas à pas, un peu perdu comme lui ; redécouvrant sa femme sous une autre identité, mais également pressé de s’enfuir et de faire fuir avec lui des étrangers à la cité.

Plus l’heure approche et plus le suspens monte jusqu’au dénouement inattendu.

J’ai aimé parcourir cette ville avec Sebastian, tenté de trouver le délateur (car on soupçonne qu’il y en a forcément un, mais qui ?), voir un nouveau pouvoir autoritaire se mettre en place.

Une très belle découverte que je dois à Zazy. Merci !

L’image que je retiendrai :

Celle des oiseaux si particuliers de cette côte (adriatique ?) qui vient se fracasser contre les vitres de la maison perchée de Sebastian.

alexmotamots.fr

Yv

Quel roman, les amis, quel roman ! Un grand merci à Zazy qui me le prêta, car franchement, j'ai pris un pied monstre et me suis régalé du début à la fin. L'histoire est folle folle folle -comme dirait Bertand Belin, aucun rapport mais ça me faisait plaisir d'en parler- et l'écrin somptueux. Ce que j'aime par dessus-tout, outre cette histoire, c'est l'écriture de Stéphane Héaume et l'ambiance qu'il crée. Bien que son roman se déroule de nos jours, et qu'il soit donc parfaitement contemporain -ce qui, vous l'avez remarqué est une répétition-, par la grâce de l'écriture, les descriptions des personnages, leurs vêtements, leur élégance, leur langage, leur port, leur distinction, les descriptions des lieux, cette ville close à l'histoire dense... il a un air d'intemporalité très forte. On pourrait invoquer ici quelques grands noms de la littérature qui ont ce talent, sans vouloir comparer mais juste pour l'inspiration, des écrivains de diverses époques que je ne citerai pas ici, chacun pourra ainsi mettre les noms qui lui viennent à l'esprit.

L'écriture donc est magnifique, travaillée, belle, châtiée ; lisez cela : "Le canal exhalait un parfum doucereux, cette odeur si troublante que l'on ne percevait qu'en hiver et qui ce soir prenait un sens étrange car souvent l'on disait qu'il sentait le sang frais." (p.37), ou bien ceci : "Soucieux de circonscrire cette régression -ou, au contraire, planifiant son maintien (qu'en savions-nous ?)-, le gouvernement avait décidé, au nom du passé, de redonner à Karlotta-Pietra son statut de ville close. Rappelant les conflits dont elle était toujours sortie victorieuse, le président avait annoncé aux habitants cette mise en quarantaine sous prétexte de veiller au bien général. Fallacieuse promesse." (p.25) J'adore ça, quel plaisir de lire de belles phrases, bien construites, sans faute de quoi que ce soit, des phrases avec du sens, qui même lorsqu'elles décrivent des lieux ou des personnages ne sont jamais ennuyeuses, au contraire, elles enjolivent l'action qui suit.

L'histoire maintenant : elle est réjouissante, originale, forte en tensions et rebondissements. Les rapports entre les protagonistes sont admirablement décrits, si bien qu'à part Sebastian dont on ne doute jamais vraiment de l'honnêteté, tous les autres à un moment ou un autre nous incitent à la prudence, à tort souvent... Critique des nationalismes, des intégrismes de tout genre, l'ouvrage pousse à l'extrême les idées et comportements de certains chantres de l'isolationnisme et du repli sur soi.

Mon premier roman de l'auteur et de l'éditeur aux couvertures safran que je brûle d'envie de connaître un peu plus tant l'un que l'autre. Merci Zazy.