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Biographie

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Mauvais garçon

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    Mauvais garçon

     Enfant, on imagine souvent que nos parents et grands-parents ont vécu de grandes choses, qu’ils ont été des héros. Jamais qu’ils ont pu être insolents, délinquants, agressifs ou même violents. Et en littérature jeunesse, rares sont les écrivains qui brossent le portrait de véritables cancres. « J’ai toujours été un mauvais garçon » : cette confidence, c’est celle que fait pourtant un grand-père, né en 1943, à son petit-fils. Aveu profond, qui mérite de faire le récit de sa propre vie. Il lui raconte alors que jeune garçon, attiré par le risque et le goût du danger, il multiplie les bêtises. Il déteste apprendre et manque souvent l’école, sauf les cours de musique de Mademoiselle West, la seule qui lui fait entièrement confiance. « Mauvais garçon », « petit voyou », telles sont les seules paroles des professeurs, des voisins et de sa propre mère, à son égard. Sans père à la maison, élevé dans une famille nombreuse, il ne tarde pas à sombrer et devient catalogué, étiqueté. Une effroyable réputation le poursuit. Et puis c’est un vol avec effraction, l’arrestation, le tribunal, et la punition ultime : une maison de redressement.

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De la modernité d'un vieux sage

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    De la modernité d'un vieux sage

    Après les six volumes passés sur le règne de Nicolas 1er (publiés entre 2008 et 2013), Patrick Rambaud nous offre une petite virée en Chine il y a vingt- cinq siècles avec ce « Maître ». Une interprétation rythmée, fantaisiste et cultivée de la vie de Tchouang, connu des taoïstes comme l'un de ses pères fondateurs. " Comment Tchouang tomba sur notre terre ", chapitre d'introduction, narre la naissance étrange du jeune Tchouang et le décès quasi instantané de sa mère : « les hommes entrent en scène aussi démunis qu'ils en sortent », rappelle-t-il non sans un humour... tranchant. Notre écrivain s'amuse tout au long d'un roman étonnamment dense pour ses 233 pages. Poétique et pleine de sagesse, la drôle de fausse biographie se nourrit de vérités et de recettes de cuisine d'une autre époque fortement déconseillées aujourd'hui. A l'image des petits pâtés de foies humains. Découpant la vie de Tchouang-tseu en courts chapitres, l'auteur nous entraine dans une (re)découverte de la Chine d'alors, entre guerres et sagesse. Tchouang est un drôle de zèbre, porté sur la contemplation et l'oisiveté, refusant les honneurs et le pouvoir, méfiant par nature, d'une curiosité totale, qui philosophe à tout va et partage le fruit de ses réflexions à qui veut l'entendre. En vieillissant, il sera rejoint par quelques disciples, malgré son manque d'envie à professer. Ses leçons de sagesse nous restent après lecture. Observer, ne pas agir inconsidérément, être dans le lâcher-prise devant certains événements : assurément un roman plus moderne qu'il n'y paraît.

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La libération et la haine

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    La libération et la haine

    Entre 1943 et 1946, 20 000 femmes furent tondues en France. La majorité pour « relations intimes avec l’ennemi », d’autres pour collaboration politique ou économique, certaines par pure vengeance. C’est justement sur l’une d’entre elles que s’ouvre « Et ils oublieront la colère ». Ce 24 août 1944, Marianne Marceau court à perdre haleine pour échapper à une foule hurlante, bien déterminée à lui raser sa belle chevelure. Qu’a-t-elle donc commis ?

    70 ans plus tard, en 2015, sur les mêmes terres de l’Yonne, le cadavre d’un homme est découvert, le thorax transpercé d’une balle. Mehdi Azem, 31 ans, professeur d’histoire-géographie, s’était installé deux mois plus tôt dans l’ancienne maison de Marianne, disparue depuis l’été 44. L’enquête est confiée à la jeune capitaine Garance Calderon. Très vite, elle apprend qu’Azem n’avait qu’une obsession : lutter contre « l’oubli définitif des horreurs du siècle dernier » car sinon la barbarie revient en boomerang. Il cherchait à retrouver toutes ces « tondues » avant qu’elles ne meurent et assurait que Marianne Marceau avait subi ce châtiment car elle était « collabo » ou « pute à Allemand ».

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Un aveugle dans la lumière

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    Un aveugle dans la lumière

    Curieuse vie que celle de Jacques Lusseyran, cet écrivain et homme de lettres français né en 1924 et largement méconnu aujourd’hui. Curieux destin en effet que celui de cet aveugle, entré très jeune dans la Résistance et qui a miraculeusement survécu à Buchenwald. Cette vie étonnante, héroïque et riche d’enseignements, l’écrivain et critique littéraire Jérôme Garcin a décidé de l’évoquer aujourd’hui dans un livre.

    Jacques Lusseyran a perdu la vue à l’âge de huit ans, à la suite d’un banal accident. Son handicap ne l’a pourtant pas empêché de réussir brillamment sa scolarité puisque, adolescent, on le retrouve lycéen à Louis-le-Grand. Mais la guerre éclate et en 1941, alors qu’il est tout juste âgé de dix-sept ans, Jacques Lusseyran fonde et prend la tête d’un groupe de résistants, les Volontaires de la liberté, composé d’étudiants très actifs. Ainsi, des jeunes gens choisissent pour chef ce jeune homme aveugle, doté semble-t-il d’un incroyable charisme, et de l’avis de tous capable de deviner mieux que personne, aux intonations de la voix, qui est fiable et qui ne l’est pas. Malheureusement, quelques temps plus tard le réseau tombe et Jacques Lusseyran est déporté à Buchenwald. Plus tard, il racontera son expérience dans un livre : « Et la lumière fut ».

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Récit d'un génial raté

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    Récit d'un génial raté

    C’est un fait : en littérature, les losers ont la cote. Du Don Quichotte de Cervantès au Zeno d’Italo Svevo, du Barney de Mordecai Richler au Bruno de Houellebecq, c’est aux médiocres qu’on s’attache, aux souffrants, aux jaloux, aux frustrés. Parce qu’il est plus aisé de s’y reconnaître, bien sûr, parce qu’ils ne nous condamnent point à une admiration stérile, mais aussi parce qu’il y a quelque chose dans leur imperfection qui potentialise l’écriture. Quand ils prennent la parole, les losers deviennent les chantres d’un langage cinglant, qui dissèque le monde avec une précision jubilatoire mais laisse toujours la place à l’empathie. Et c’est d’abord pour le plaisir que procurent ses phrases ciselées et ses dialogues saignants qu’il faut lire « Scipion », cinquième roman de l’Urugayen Pablo Casacuberta (et premier traduit en France), récit d’un fils écrasé par son père, d’un génial raté, et dentelle d’humour, d’ironie et de sens de l’observation. Aníbal Brener doit la vie à un historien mondialement reconnu, « le professeur ». Et il lui doit aussi son prénom, hommage à l’un des plus grands vaincus de l’Histoire : Hannibal Barca, seigneur de guerre carthaginois mis en échec par le général romain Scipion, et condamné à finir son existence « borgne, humilié, et seul ». Tout un programme… Auquel Aníbal s’est jusque-là consciencieusement plié, abandonnant ses ambitions universitaires pour aller croupir au fond d’une misérable pension de famille, biberonnant du matin au soir, avec pour tout compagnon un colocataire octogénaire incontinent. Et puis le professeur est mort, et Aníbal, banni de la famille depuis des années, l’a appris par la presse. Mais même depuis l’au-delà, le professeur parvient à humilier son fils indigne ; et l’humiliation prend la forme d’une ligne sur un testament. Car le professeur n’a pas déshérité son fils. Sa grande propriété, sa collection de livres, son capital, tout lui reviendra le jour où Aníbal aura signé un ouvrage d’histoire à lui, sur quelque sujet que ce soit. Autrement dit : une fois qu’il aura mis les pas dans ceux de son père. Ou plutôt qu’il aura essayé de le faire, car avec la meilleure volonté du monde, jamais Aníbal ne pourra espérer atteindre le firmament paternel. Poussé par la nécessité, il accepte pourtant le « deal » et s’engage à rédiger la biographie d’une importante figure politique de la moitié du siècle. Emportant avec lui les journaux intimes de son père – le seul héritage dont il a d’ores et déjà le droit de jouir – Aníbal part documenter son ouvrage, au cœur de la pampa, dans une grande propriété coloniale habitée par la petite-fille de l’homme politique. Mais sur place, dans cette étrange maisonnée peuplée de dégénérés de tous poils, Aníbal apprend surtout à connaître son père, cet homme dont la lecture des journaux intimes fait peu à peu tomber les masques. Ce géniteur pervers, ce monarque impitoyable que rien n’amusait tant que de séduire les rares conquêtes de son fils se dévoile sous les atours d’un homme brisé, abandonné par sa femme – et c’est dans la figure de cette mère démissionnaire que réside le grand point d’interrogation du roman, ainsi que sa résolution. En se lançant dans une bataille contre son sort, le faible Hannibal devient finalement le fort Scipion. Sauf que ce n’est pas en tuant le père qu’il remporte la guerre, mais en apprenant l’indulgence – envers ses parents, et surtout envers lui-même. En apprenant à baisser les armes que sont l’ironie constante et le nihilisme, en acceptant de les remplacer par la tendresse. En acceptant de se départir du rôle de loser pour se mettre en jeu dans le monde des sentiments. Et ainsi, le très cynique « Scipion » devient le plus touchant des récits de libération.

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