• Arnaud B. Libraire

    Fairyland : où l'on croisera Harvey Milk et ses opposants aussi farouches que grossiers ; Richard Brautigan, désabusé dès le petit déj' ; Allen Ginsberg en figure tutélaire ainsi que la clique queer du Haight Street de San Francisco ; enfin, Steve Abbott, pierre de touche entre ce monde et sa fille qu'il élève seul. Pour nous faire parvenir cette lettre d'amour au père, Alysia Abbott replonge dans ses souvenirs en s'aidant des cahiers à spirales du poète, des photos de famille, de leur correspondance. On suit leur vie à deux, les doutes, les émois, les improbables colocations, la musique et l'effervescence des revues de poésie, l'université, le sida. C'est un récit à la beauté diaphane, comme si on lisait à travers les peaux : c'est un livre sur ce qui nous est donné par amour. Coup de cœur.

  • Arnaud B. Libraire

    A Piura, Felicito Yanaqué, homme simple et droit, dirige une entreprise de transports réputée. A Lima, l'avocat don Rigoberto prend sa retraite et souhaite voyager en Europe avec sa famille. Le premier, guidé par la devise paternelle va refuser de payer le tribut que la mafia lui impose et devenir un héros pour les citoyens du nord. Le second, témoin au mariage à scandale de son octogénaire de patron, saura s'opposer selon ses convictions aux menaces des fils de son vieil ami. Tout cela chapeauté par l'incorruptible sergent Lituma, de retour en ville après avoir purgé sa mise à l'écart. Ces héros discrets se rencontreront inéluctablement. On embarque un sourire aux lèvres pour leurs mésaventures, on rit des situations burlesques. Grand roman rabelaisien mâtiné de dialogues lumineux et d'un art formidable de l'oralité et de la narration, Vargas Llosa nous prouve qu'il est l'un des derniers géants de la littérature.

  • Arnaud B. Libraire

    Livre sur l'amitié et sur ce qu'il advient des talents précoces que l'on tente de développer, que l'on abandonne ou qui nous quittent, que la vie se charge d'affadir ou qui nous épuisent, Les Intéressants de Meg Wolitzer est aussi un livre tout en subtilité sur le temps qui passe. Figman, Jules, Goodman et Ash, Jonah et Cathy Kiplinger, autant de noms qui résonnent en nous, comme ceux de nos copains de classe jamais oubliés ; l'auteur parvient immédiatement à nous attacher à ces ados, qui ne le resteront certes pas, mais qui garderont tout au long de leur vie un œil sur ce qui s'est passé cet été-là, à Spirit-in-the-Woods. Alors c'est la vie adulte qui défile avec son lot d'empêchements, d'interrogations et de libérations ; décrite avec force douceur, l'amitié indéfectible se patinera du temps qui embellit le bois et bonifie les vins, jusqu'à nous tendre ses plus belles rides.

  • Arnaud B. Libraire

    C'est avec une grande sensibilité que David James Poissant fait évoluer son lecteur dans des natures tantôt au goût de rouille tantôt anamorphes comme un animal imbibé de mercure. Figé, mouvant. Les animaux ne sont jamais très loin, captifs malgré les grands espaces, opposant leur reflet à l'homme qui les épie. Libre, enfermé. Les rapports humains sont profondément étirés quand, en parallèle, la forme que la nouvelle induit, laisse libre court à l'auteur pour instiller des coupes aux effets des plus réussis. Ce recueil un brin moral, un peu fou aussi, laisse dans sa traîne un sentiment d'empathie vis à vis des protagonistes qu'on y a croisé. On est même ravi de retrouver les héros de la première nouvelle dans celle qui clôt l'ouvrage. Comme si on se connaissait.

  • Arnaud B. Libraire

    Peut-être que parmi tous les archétypes de héros russes, Nikolaï est-il le moins mélancolique. C'est un fils, un neveu, un soldat, un ami intransigeant. Il sait ce qu'il veut, ne regrette rien. Nourri de littérature dès son plus jeune âge, orphelin de père, marqué par son passage chez les cadets, il se mettra au service de l'armée blanche avant de retrouver son amante, Claire, à Paris. Roman d'initiation dans la Russie des années 1910, les péripéties du jeune héros sont sublimées par la superbe écriture de Gazdanov ; les dialogues échangés avec son oncle, par la suite, sur le sens de la vie touche leur cible en plein cœur. Partout la vie qui coule dans les veines de Nikolaï nous éclabousse quand les élans de son auteur, tout droit sortis de 1929, se pique d'un style ignoré à notre époque.